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Alain.R.Truong
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Alain.R.Truong
12 avril 2007

"La Nouvelle-Irlande : découverte et fascination" au Musée du Quai Branly

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Masque casque avec un nez ajouré représentant un oiseau et un poisson, nord de la Nouvelle-Irlande, île de Lavongai, collecté en 1875 par le capitaine lieutenant H. Strauch du S.M.S Gazelle, Berlin, Ethnologisches Museum. (©Bildarchiv Preussischer Kulturbesitz, Berlin/photo Frank)

L’île de Nouvelle-Irlande se situe à l’est de la Nouvelle-Guinée, dans l’arc mélanésien. Avec la Nouvelle-Bretagne et plusieurs îles de plus petite taille, elle forme l’archipel Bismarck. Elle tient ce nom de son histoire coloniale : comme le nord de la Nouvelle-Guinée, l’archipel Bismarck a été une colonie allemande de 1880 à 1914.

Placées ensuite sous protectorat australien, les îles de l’archipel Bismarck font aujourd’hui partie de l’état de Papouasie-Nouvelle-Guinée.

C’est le navigateur hollandais Willem Schouten qui découvre cet archipel inexploré en 1616, mais la première évocation de ses habitants remonte à 1643.

Les objets, dont le raffinement a immédiatement séduit les Européens, entrent dans les collections publiques à partir du milieu du 19e siècle. Les décennies suivantes sont marquées par une création intense dans le nord de l’île et la colonisation allemande contribue à systématiser les collectes. Les musées allemands principalement s’enrichissent de ces sculptures impressionnantes rapportées par des voyageurs et des ethnologues.

Au début du 20e siècle, les artistes, à leur tour, sont fascinés par l’inventivité de l’art de Nouvelle-Irlande. Le peintre expressionniste allemand Emil Nolde, par exemple, prend part à une expédition médicale et s’inspire de ce qui lui est révélé sur place pour en nourrir son œuvre. Un peu plus tard les artistes et écrivains surréalistes : André Breton, Paul Eluard, Louis Aragon, entre autres, collectionnent les sculptures de cette partie du monde.

Une deuxième génération d’artistes - dont Roberto Matta, Arman - s’intéresse aussi à ces pièces qui, avec le temps, deviennent de plus en plus rares sur le marché et sont de plus en plus recherchées.

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Sculpture cérémonielle, Bois sculpté, ajouré et gravé, pigments blanc, brun, rouge et noir, opercules de turbo (© musée du quai Branly photo Patrick Gries)

Rites et cérémonies

Il existe quelque 22 langues en Nouvelle-Irlande et un nombre impressionnant de sociétés possédant leurs rites et leurs objets propres avec une tradition artistique particulière qui leur est associée.

La mort et le culte des ancêtres sont primordiaux en Nouvelle-Irlande. Dans le nord de l’île, La cérémonie malagan qui met fin à la période de deuil, en est le meilleur témoignage. Cet imposant rituel est destiné à honorer un mort et sa famille car, en acceptant de « finir le mort », selon l’expression consacrée, les hommes captent son énergie, et sa force vitale est transférée à un membre du clan. Le défunt, quant à lui, peut rejoindre le monde des esprits, celui de ses ancêtres, et assurer la protection de ceux qui restent.

Des objets sont utilisés pour cette phase ultime ; exposés, ils matérialisent le sens de cet acte hautement symbolique. Une sculpture, en réalité, n’a de sens que si elle est active, et par conséquent efficace, dans le cadre des fêtes qui marquent la vie de la communauté : naissances, initiations, funérailles, commémoration des morts.

Dans le sud, ce sont les masques de la société tubuan, dont la fabrication est couverte par un secret, qui sont donnés aux jeunes initiés.

Ces masques continuent à fonctionner aujourd’hui. Ils n’ont rien perdu de leur puissance puisqu’ils ne sont jamais sortis de leur territoire d’origine. Aucun n’a pu être montré dans les collections publiques.

D’autres cérémonies, enfin, atteignent un autre but. Certaines d’entre elles, en effet, sont de l’ordre du divertissement, assimilées à des pantomimes théâtrales.

Ainsi, les pièces de Nouvelle-Irlande sont-elles intimement liées aux règles de la société. Toute œuvre sculptée est inséparable du monde des ancêtres et des esprits, au cœur de la vie des populations de Mélanésie. Pour autant, une création n’est jamais la représentation d’un ancêtre : elle est plutôt l’expression de sa manifestation parmi les hommes.

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Masque, Fibres végétales, baguette polychrome, écorce battue, plumes, graines (© musée du quai Branly photo Patrick Gries et Bruno Descoings)

Un art riche et complexe

L’art de Nouvelle-Irlande est l’un des plus spectaculaires de l’Océanie.

Les sculptures se distinguent par leur virtuosité formelle, leur haute dimension, la complexité de leurs motifs. Figures humaines et animales se fondent et s’entremêlent jusqu’à constituer des êtres imaginaires ancrés dans la profondeur du mythe.

Les statues malagan occupent une place particulière dans l’art de la Mélanésie. Elles se caractérisent par le jeu très subtil qui existe, dans leur architecture même, entre la sculpture et la peinture. Elles donnent le sentiment d’une variation infinie autour d’un même thème. Ce sont précisément ces variantes, avec leurs points forts, leurs articulations délicates et leurs ponctuations, qui font l’originalité et l’immense créativité de l’art malagan.

Les masques mettent davantage en valeur l’utilisation originale des matériaux naturels. Cette association d’éléments disparates qui participent de la poésie des pièces de Nouvelle-Irlande souligne l’harmonie qui existe entre les hommes et leur milieu d’origine.

Quant à l’artiste, il a toujours été un homme respecté, reconnu au sein du groupe auquel il appartient. Il est détenteur d’un savoir dont l’œuvre est dépositaire.

Notons d’ailleurs que les objets, en Nouvelle-Irlande, n’ont jamais été réalisés pour la vente. Ceux qui sont parvenus en Europe ont été achetés lorsqu’ils avaient cessé d’être utilisés, d’être « agissants ».

L’art de Nouvelle-Irlande demeure vivace même si les styles, au fil du temps, ont évolué en fonction des régions. Les danses masquées, notamment, sont encore très présentes aujourd’hui, à l’occasion de rituels importants, attestant la pérennité des cérémonies et des croyances. Un film tourné en septembre 2006 et diffusé dans l’exposition en témoigne.

L’exposition présente un large panorama de ces arts de Nouvelle-Irlande, à travers une variété d’objets d’une grande qualité plastique.

Je suis allé au vernissage presse avec mon frère un matin. C'était très agréable d'y circuler preque seuls et de pouvoir contempler à son aise une culture dont j'avoue ignorer presque tout jusqu'à présent. J'ai été captivé.

L’exposition « Nouvelle-Irlande, Arts du Pacifique Sud » se tient au musée du Quai Branly jusqu’au 8 juillet. Renseignements : http://www.quaibranly.fr

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