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Alain.R.Truong
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Alain.R.Truong
5 août 2007

Le renouveau des bonsais au Vietnam et au Japon

1Il y a de cela bien longtemps, plus d'un demi-siècle. Chaque année, à l'approche du Têt, mon père allait au grand marché Dông Xuân pour acheter des orchidées, des plants de chrysanthèmes et de pivoines, des pins ou des banians nains...
C'était pour renouveler une dizaine de pots de plantes d'agrément entassés dans une cour étroite. Nous habitions dans le vieux quartier de Hanoi, rue du Chanvre, là où se retiraient des mandarins intègres, des bacheliers et des licenciés de l'ancien régime fuyant les honneurs.

Pour les lettrés confucéens, plus ou moins taoïstes ou bouddhistes, les plantes d'agrément sont des amis, comme la musique, la poésie, la peinture et les échecs. Chacune d'elles, par ses lignes et son port, sa tige, ses branches et son feuillage, a valeur de symbole. Le bambou d'ivoire et le pin évoquent le quân tu, l'honnête homme qui se distingue par sa droiture et son intégrité morale. Le prunier qui fleurit tard en plein hiver représente l'abnégation et la pureté de l'âme. Les bonsaïs solitaires ou accolés symbolisent les vertus confucéennes en famille et société : piété filiale, union conjugale, amitié spirituelle, respect du disciple pour son maître. Les fleurs dont plus d'un nom est donné au sexe féminin disent son charme, sa fidélité, sa tendresse, sa finesse, ses qualités d'épouse et de mère.

Au cours des 30 ans de révolution et de guerre, dans le Nord du Vietnam, les plantes d'agrément n'avaient plus trouvé de place dans la vie quotidienne. Elles ont de nouveau émergé depuis le retour de la paix, surtout après l'application de la politique de Dôi moi (Renouveau) qui a apporté assez d'aisance à certaines couches urbaines. Les nouveaux amateurs ne se recrutent plus que chez les personnes âgées et le sexe masculin, mais surtout parmi les jeunes hommes et même les jeunes femmes qui ont trouvé un emploi stable ou réussi dans l'entreprise libre. Mais l'ancien esprit des plantes d'ornement a changé. Elles sont devenues pour les nouveaux riches de simples objets de décor sans âme, elles apportent leur beauté neutre aux salons et hôtels de luxe. C'est devenu une marchandise ou un objet de décoration dont on vante la valeur marchande : "Mon sycomore nain vaut 3 millions de dôngs, mon banian bonsaï coûte 500 dollars...". L'engouement actuel si ostentatoire pour les plantes d'agrément est bien loin de la discrétion de nos pères. Certainement, il existe toujours des amateurs amis désintéressés des plantes d'ornement.

Au Japon, les plantes d'ornement font partie de la culture nationale. Il m'est arrivé de visiter la maison d'un sabotier de la toute petite ruelle Fukuromachi à Tokyo, construction qui avec d'autres petites habitations rampait sur une levée de terre. Une vingtaine de pots de plantes d'ornement escaladaient les marches de pierre contiguës et envahissaient même la moitié de la cour étroite.

L'amour des Japonais pour les plantes d'ornement s'exprime dans l'art des arbres et arbustes miniaturisés selon une technique spéciale. Comme au Vietnam, les bonsaïs étaient l'apanage des hommes âgés. Récemment, les bonsaïs y connaissent une nouvelle vogue, vogue de mini-bonsaï chez les jeunes femmes. Le quotidien Yomiuri nous fait savoir que son instigateur est Kaori Yamada, 28 ans, spécialiste des bonsaïs. L'initiative provient de cette réflexion : "Les gens sont aujourd'hui très occupés. On est toujours pressé, on ne veut perdre aucune seconde. Mais le bonsaï ralentit votre train de vie, il vous fait vous concentrer sur la plante devant vous. D'ailleurs, pour bourgeonner ou fleurir, cela demande des mois à la plante. Il y a la joie de l'attente, et je pense que c'est cela qui donne du plaisir aux femmes".

Yamada est issue d'une famille qui depuis 5 générations cultive une pépinière de bonsaïs. Avec son boom économique, le jeune Japon modernisé a délaissé les bonsaïs pour des articles décoratifs de luxe. Yamada elle-même a commencé par bouder les plantes naines. Mais quand elle étudiait à Paris, elle a trouvé le décor high-tech trop froid et alambiqué, et elle est retournée aux bonsaïs traditionnels pour les moderniser. Des mini-bonsaïs, parfois 3 plantes accolées, des règles très simples et non plus les complications de l'art ancien. Cela suffit, dit-elle, à créer des "paysages". Elle a réussi à faire de nombreux adeptes féminins qui trouvent dans les mini-bonsaïs un remède contre le stress de notre époque de mondialisation. (Huu Ngoc/CVN)

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