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Alain.R.Truong
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22 mars 2008

Tây Nguyên : l'âme de la montagne dans un musée

00090mD'une superficie de plus de 300 m², le musée des objets antiques du Tây Nguyên de Dang Minh Tâm semble surchargé avec ses 3.000 pièces exposées. Son propriétaire ne cesse de compléter ses collections au fil des jours. Au plus grand bonheur de tous ceux qui sont désireux de découvrir la quintessence de la culture des hauts plateaux du Centre.

Da Lat, province de Lâm Dông (hauts plateaux du Centre). D'une jolie villa de style français, sise rue Hà Huy Tâp, se dégage une image particulière. C'est ici que s'entrepose une multitude d'antiquités dont le propriétaire a mis plus de 30 ans à réunir. L'intérieur nous plonge dès les premiers pas dans l'ambiance mystérieuse du Tây Nguyên. Cette immense région montagneuse qui longe le Centre du Vietnam est foyer de nombreuses ethnies. Anciens gongs et jarres en bronze, instruments de musique extraordinaires en bronze, pierre, bois et bambou, voire en peau d'éléphant, hottes variées en formes et matières, costumes multicolores des minorités ethniques, outils de chasse ou de culture... Un trésor d'une valeur inestimable qui étonne même des scientifiques et chercheurs en culture folklorique, vietnamiens comme étrangers.

C'est en 1978 que Dang Minh Tâm, un policier de 18 ans originaire de Nam Dinh (Nord), se porte volontaire dans la région, avec comme mission de traquer les réactionnaires. De longues années de lutte et de fraternité avec la communauté multiethnique des hauts plateaux du Centre lui ont donné un attachement profond à cette terre. Les locaux l'appellent alors K'Tâm.

10_Bourgeois_3I00006M2De la curiosité à la passion
"Chaque objet du Tây Nguyên a son charme et son âme", explique-t-il. Avec curiosité, il cherche à comprendre la "vie" de chacune des pièces qu'il rencontre lors de ses missions dans les villages reculés. Au début il en acquiert quelques-unes "comme souvenir", raconte K'Tâm. Très vite "la curiosité initiale s'est transformée en passion", avoue-t-il.

Aujourd'hui, son musée des antiquités du Tây Nguyên expose plus de 3.000 pièces, alors que ses caves en comptent des milliers d'autres qui malheureusement restent à l'ombre, faute de place.

À elle seule, la collection des jarres s'appuie sur des centaines de pièces, toutes différentes en âge et forme. Les plus extraordinaires sont celles en bronze issues du royaume Phu Nam (13e siècle) et celles de S'Nung (16e siècle). Certaines se distinguent par les gravures en bas-reliefs raffinées, représentant des dragons, fleurs ou motifs ornementaux bizarres. "Pour les aborigènes montagnards, la jarre constitue un bien précieux qui témoigne de la richesse et de la position sociale du possesseur, avance K'Tâm. Une belle jarre est égale à des dizaines de buffles et parfois peut racheter la vie de quelqu'un".

L'éventail des hottes exposées est très surprenant. Faite souvent avec du bambou tressé, la hotte est un objet inséparable des habitants de la montagne. Hommes ou femmes la portent sur les épaules pour aller aux champs ou au marché. Des centaines de hottes sont alignées en ordre, seules les tailles et couleurs traduisant leur importance. "Chaque ethnie a sa propre hotte. Tandis que celle des Gia Rai a 3 pieds, celle des Edê possède un piédestal en bois. Différente des autres dont la partie supérieure est toujours évasée, la hotte des Vân Kiêu est en forme de cylindre", explique avec passion le collectionneur. Et d'ajouter qu'il ne s'agit là que des plus originales d'une collection qui dépasse le millier de pièces. D'où son surnom donné il y a longtemps par ses amis : "Tâm gùi" (Tâm la hotte).

Une autre salle est consacrée à la chasse. Arcs, arbalètes, flèches, pièges, traquenards, cordes, cages, nasses, lances, filets... Une multitude d'objets rudimentaires qui rappellent les scènes de chasse des peuplades nomades d'antan. À côté, sont exposés des vêtements originaux faits à partir des matières brutes de la forêt. "Ce cache-sexe, confectionné avec des tiges rampantes, appartenait au chef d'une tribu K'ho, tandis que cette jupe en écorce de bambou était portée par une fille J'rai", précise K'Tâm avec un brin de fierté. Les vieux instruments de tissage et de teinture viennent compléter à la perfection cette collection vestimentaire multicolore.

Sa collection préférée : la musique
Il paraît que la salle où les visiteurs passent le plus de temps est celle dédiée à la musique. Il est vrai que la première fois s'en dégage une vraie "stupeur émotionnelle" face à la féconde créativité des montagnards de jadis. Une cinquantaine de types d'instruments dont chacun compte des dizaines d'échantillons. Tambours en peau de cerf ou d'éléphant, flûtes dinh put, lithophones, cithares t'rung et dinh di, flûtes de pan, guimbardes, klông put, dông la... Les plus extraordinaires sont peut être des ensembles de gongs et gongs plats en bronze, objets incontournables des festivités et cérémonies cultuelles des ethnies du Tây Nguyên. "Les gongs +pasadot+ (ensemble de 4 pièces) des Chu Ru produisent des sons éclatants comme ceux du ruisseau en saison des crues, tandis que ceux des Ma (ensemble de 6 pièces) retentissent comme si la résonance provenait de loin", s'enthousiasme K'Tâm en parlant de sa collection préférée. Il rappelle d'ailleurs que l'UNECO a classé l'art des gongs du Tây Nguyên patrimoine culturel de l'humanité.

Le musée de K'Tâm présente aussi des trônes faits de bois précieux et d'ivoire d'éléphant, bijoux, bracelets, colliers, bagues, boucles d'oreilles... très simples en style et en matière. Enfin, on s'attarde devant les centaines de photos prises par le patron, illustrant des scènes de vie quotidienne ou de manifestations cultuelles des ethnies du Tây Nguyên.

"Il semble que l'âme de la montagne et de la culture du Tây Nguyên soit enfermée dans ce petit musée", avance ce chercheur en culture folklorique lors d'une visite. Avec un sourire, Dang Minh Tâm révèle qu'il a refusé, à plusieurs reprises, le rachat de ses pièces. "Deux milliards de dôngs pour une partie de ma collection. C'est une importante somme pour moi. Mais je ne peux pas me résoudre à vendre une partie de ma vie, de ce témoignage de la civilisation millénaire des hauts plateaux du Centre - ma seconde terre natale", confie-t-il simplement. (Nghia Dàn/CVN)

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