Pendentif représentant un aigle à deux têtes. Delta du Diquis. Costa Rica. 1 000-1 500 après J.-C.
Pendentif représentant un aigle à deux têtes. Delta du Diquis. Costa Rica. 1 000-1 500 après J.-C. 11 x 12 cm. Estimation : 50 000/75 000 €.
Le 26 septembre dernier, une trentaine de bijoux d’or, du Costa Rica et du Panama, issus de l’ancienne collection Charles Craig, recueillaient des enchères comprises entre 2 000 et près de 50 000 €. En sera-t-il de même de la petite dizaine de pendentifs proposés dans quelques jours ? On peut le supposer ou tout au moins l’espérer. Car à la rareté s’ajoute ici le raffinement de cette orfèvrerie, qui, comme l’indiquait l’exposition "Les esprits, l’or et les chamans" du Grand Palais, au printemps 2000, offrait au visiteur de "voir le monde avec d’autres yeux". Si cette dernière invitait le voyageur en terre colombienne, la dispersion d’aujourd’hui, comme celle de la collection Craig, convie l’amateur dans une zone s’étalant sur 200 km, entre le Costa Rica et le Panama, dans les régions du Diquis, du Chiriqui et du Veraguas. Comme le feu, l’or est sacré avant même de conférer puissance et beauté. Il est la chair et la peau de la divinité, la gloire, la lumière retenue qui va immortaliser et rapprocher du divin celui qui le porte : le chaman. La datation de ces bijoux, exécutés selon les techniques de la fonte à la cire perdue et du filigrane, se situe entre 800 et 1 500 après J.-C. C’est l’âge d’or des Indiens d’Amérique Centrale. "Celui où l’or n’est plus adoré, mais où il sert à adorer, où il rappelle les devoirs de la véritable adoration", écrit Solange Auzias de Turenne. Portés (sur le torse) durant sa vie terrestre, ces pendentifs accompagnent également le chaman dans la tombe, ou plutôt dans son existence dans l’au-delà. Il est donc logique que leur iconographie soit liée aux rituels chamaniques et particulièrement à l’évocation de la transformation et du vol extatique du prêtre. Ces mutations pouvaient être multiples, comme en témoigne le bestiaire fantastique de la collection Craig et de celle d’aujourd’hui. L’homme-oiseau (ou l’aigle), symbolise le vol du chaman dans d’autres mondes. Porteurs de l’énergie vitale et créatrice du soleil, ces bijoux jouaient leur rôle à l’occasion de cérémonies religieuses ou de rites funéraires. Les choses changent complètement avec l’arrivée des conquistadors. Auparavant symbole de prestige, l’or devient source d’enrichissement pour la couronne espagnole. Une nouvelle preuve, s’il en était besoin, que rien ni personne n’est éternel ! www.gazette-drouot.com Mercredi 16 avril, salle 4. Binoche SVV. M. Blazy.