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Alain.R.Truong
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28 août 2008

La formation à la musique traditionnelle, trésor national

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Huong Thanh Trio, (musée Guimet, Paris) (photo http://flickr.com/photos/dalbera/)

Face à l'émergence des styles musicaux inspirés par la culture occidentale, la musique traditionnelle éprouve des difficultés à attirer l'attention du public. Pour préserver ce patrimoine, une réflexion doit être menée en vue de trouver de nouvelles orientations, notamment au niveau de la formation des artistes.

La musique traditionnelle contient des valeurs immatérielles transmises de génération en génération. Depuis des années, cet art séculaire est la figure de proue de la musique vietnamienne lors des échanges internationaux. Préserver cet art et former des instrumentistes talentueux se posent donc comme des impératifs si l'on veut que la musique traditionnelle continue d'affirmer la richesse de la culture nationale à travers le monde. Aujourd'hui, à l'exception des vieux artistes amateurs qui disparaissent peu à peu, les diplômés des départements de la musique traditionnelle des conservatoires de musique sont les seuls gardiens de cet art, l'un des trésors de la nation.

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Huong Thanh Trio, (musée Guimet, Paris) (photo http://flickr.com/photos/dalbera/)

Depuis plusieurs années, le développement impétueux de la musique contemporaine fait de l'ombre à la musique traditionnelle. Une majorité du public a tourné le dos aux musiciens traditionnels, préférant les jeunes artistes inspirés par le rock ou la pop. Et, même dans les localités berceaux des arts traditionnels, les jeunes délaissent la musique traditionnelle au profit des styles musicaux contemporains. Les uns ont en effet peur de se retrouver au chômage comme de nombreux diplômés des départements de la musique traditionnelle. Les autres ont un peu plus de chance et jouent dans des restaurants ou des bars mais, pas de quoi faire rêver les "musiciens en herbe".

La formation des artistes de la musique traditionnelle et l'attirance du grand public sont des sujets qui font l'objet de vives discussions entre musicologues, professeurs de musique et artistes. Nombre d'entre eux ont d'ailleurs participé fin mai à un colloque portant sur ces questions au Conservatoire national de musique de Hanoi.

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Huong Thanh Trio, (musée Guimet, Paris) (photo http://flickr.com/photos/dalbera/)

Fondé en 1956, le Conservatoire national de musique de Hanoi est le plus grand foyer de formation de musiciens du pays. Cet établissement a, dès sa création, accordé une attention particulière à la formation des musiciens traditionnels. Preuve de cet intérêt, un département entier est dédié à la musique traditionnelle. Aujourd'hui, il propose des cours pour une dizaine d'instruments dont le monocorde (dàn bâu), la cithare à 16 cordes (dàn tranh ou dàn thâp luc), le cithare à 36 cordes (tam thâp luc), le luth piriforme (dàn ty bà), la vièle à 2 cordes (dàn nhi), le luth en forme de lune (dàn nguyêt) et la flûte en bambou (sao truc). Ce département propose 2 cycles de formation : le premier, d'une durée de 6 ans, et le second, de 4 ans, soit l'équivalent d'un cursus dans l'enseignement supérieur. L'établissement a, au fil des années, développé différentes méthodes pédagogiques. Une des particularités de ces diverses approches : la formation associe l'échelle musicale vietnamienne au système de notation de la musique occidentale. En outre, les étudiants choisissent 2 instruments, l'un est considéré comme principal et l'autre, comme secondaire. Et parfois, pour leur plus grand bonheur, les professeurs cèdent leur place à de vieux artistes amateurs heureux de pouvoir transmettre leur savoir aux jeunes générations.

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Huong Thanh Trio, (musée Guimet, Paris) (photo http://flickr.com/photos/dalbera/)

Toutefois, les lacunes dans la formation des artistes de la musique traditionnelle existent. "Il manque un programme détaillé et homogène des cours pour chaque instrument", souligne la directrice du Département de la musique traditionnelle, Thanh Tâm. Et de préciser : "Aujourd'hui, chaque professeur doit lui-même concevoir ses cours en respectant le contenu du programme-cadre". Cela aboutit à une réalité : "plus les professeurs ont de l'expérience, plus ils donneront des cours de qualité. Les étudiants qui ont la chance de suivre des cours avec de tels professeurs partent avec un avantage certain sur leurs camarades...", constate Mme Tâm.

Par ailleurs, plusieurs professeurs de musique se plaignent de l'absence des programmes incluant l'apprentissage des instruments typiques des orchestres du théâtre populaire (chèo) et du théâtre traditionnel (tuông). Ils pointent du doigt l'absence des programmes d'instruments d'ethnies minoritaires. "Il y a quelques années, l'apprentissage du T'rung, un instrument traditionnel d'ethnies minoritaires des hauts plateaux du Centre, était intégré au programme du conservatoire. Aujourd'hui, cet instrument ne fait plus partie des cours proposés par l'établissement", remarque Nguyên Xuân Bac, professeur de l'École supérieure des arts et de la culture de l'armée.

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Huong Thanh Trio, (musée Guimet, Paris) (photo http://flickr.com/photos/dalbera/)

Si peu de temps et tant de choses à apprendre

"Le répertoire des différents genres théâtraux traditionnels est très riche et jugé difficile d'accès, pourtant, le temps consacré aux études de ces répertoires est très limité," selon Bùi Lê Chi, professeur de monocorde du conservatoire de Hanoi. "Pour preuve, la première année est consacrée au théâtre populaire (chèo) qui compte près de 150 airs principaux, la deuxième à la musique de cour de Huê et ses quelque 40 œuvres, sans parler de la musique cérémoniale et folklorique. À l'issue de ces formations très courtes, les étudiants n'arrivent à retenir qu'un nombre limité de morceaux pour chaque genre théâtral, et c'est dommage", conclut Bùi Lê Chi.

Autre constat qui attriste le professeur de monocorde du conservatoire de Hanoi : peu de jeunes font preuve de créativité. Ils ne sont pas nombreux à être passionnés et la plupart ne sont pas assidus. Pis encore, beaucoup ne voient pas l'intérêt d'apprendre avec de vieux artistes amateurs.

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Huong Thanh Trio, (musée Guimet, Paris) (photo http://flickr.com/photos/dalbera/)

La formation à la musique traditionnelle se trouve toujours dans une phase expérimentale, affirme le professeur Nguyên Trung Kiên, ancien vice-ministre de la Culture. "En une cinquantaine d'années, le Conservatoire national de musique de Hanoi a formé un grand nombre de musiciens traditionnels. Actuellement, les conceptions sur la préservation et l'enseignement de la musique traditionnelle évoluent au sein de la société et il est important de prendre en compte ces évolutions", souligne le professeur sexagénaire Nguyên Trung Kiên. C'est pourquoi, selon lui, il est indispensable de mener des recherches pour trouver de nouvelles orientations. En effet, comment faire évoluer la musique traditionnelle sans en perdre les valeurs est une question d'actualité dans de nombreux pays. Et, pour le professeur Trung Kiên, chaque peuple doit réfléchir à cette question en ne perdant pas de vue de ses conditions et ses caractéristiques nationales propres.

Pour l'heure, le Conservatoire national de musique de Hanoi réfléchit à la possibilité de mettre en oeuvre le projet de centre de démonstration des instruments traditionnels, fait savoir le professeur Ngô Van Thành, directeur du conservatoire. Ce lieu où seraient présentées au public des œuvres anciennes et contemporaines, devrait donner un nouvel élan à la musique traditionnelle. Pour les étudiants du conservatoire, ce centre leur donnerait l'occasion d'accéder à la scène et au public. Ce projet est donc porteur d'espoir pour tous les amateurs et professionnels de musique traditionnelle, un art séculaire qui est une des figures de proue de la culture vietnamienne à travers le monde. (Hoàng Hà\CVN)

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