Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Alain.R.Truong
Alain.R.Truong
Visiteurs
Depuis la création 51 159 033
Archives
Newsletter
Alain.R.Truong
16 décembre 2008

Jacques Daret (vers1403-actif jusqu’en 1468), Donateur et saint Augustin

6Jacques Daret (vers1403-actif jusqu’en 1468), Donateur et saint Augustin, huile sur panneau de chêne, 80,2 x 28,5 cm. Estimation : 200 000/250 000 euros.

Originaire de Tournai, Jacques Daret rejoint l’atelier de Robert Campin dans cette même ville. Là, il rencontre Rogier van der Weyden ; leur parenté de style est telle que les deux artistes furent souvent confondus. Puis notre peintre se rend à Arras en 1433, où il travaille pour Jean du Clercq, abbé du monastère bénédictin de Saint-Vaast. Élu par le chapitre en 1428, ce dernier commande la décoration d’une chapelle dédiée à la Vierge, derrière le maître-autel, et engagera Jacques Daret pour peindre et dorer les sculptures, les éléments architecturaux, mais aussi l’antependium, les volets intérieurs et extérieurs du retable. Il fallait que tout soit en place pour l’ouverture, le 9 août 1435, du congrès d’Arras, qui se tient dans l’église devant une assemblée prestigieuse. Se déplaçaient pour l’occasion Philippe le Bon, l’empereur Sigismond de Luxembourg, des envoyés des royaumes de Pologne, de Castille et d’Aragon, des délégations françaises et anglaises...
Le talent de Jacques Daret est aussi reconnu par les ducs de Bourgogne. Il participe au décor du banquet du Voeu du faisan, organisé par Philippe le Bon en 1454 à Lille, et à celui des festivités lors du mariage de Charles le Téméraire, à Bruges en 1468. Après, on perd sa trace... Du retable de Saint-Vaast, ne subsistent que quatre panneaux : La Visitation, où apparaît notre abbé en donateur, L’Adoration des mages, tous deux conservés au Staatliche Museen de Berlin, La Nativité, désormais au musée madrilène Thyssen-Bornemisza, et, enfin, La Purification ou Présentation au Temple, visible au Petit Palais, à Paris. Jacques Daret bénéficia des faveurs de Jean du Clercq pendant encore vingt ans. Ainsi en 1447, il est chargé de la dorure d’une croix pour la place de Saint-Vaast (ancien cimetière de l’abbaye). Regardez bien notre tableau, réalisé pour un volet gauche de retable : en haut de la croix tenue par l’évêque, se tient un religieux en prière au pied de la Vierge à l’Enfant ; il est parfaitement semblable à celui figurant sur la croix de la place.
Le religieux et l’homme agenouillé sont immédiatement identifiables comme un saint présentant un donateur en dévotion. Devant une scène de la vie du Christ ou de la Vierge, cette disposition figure sur nombre de tableaux au XVe siècle, en particulier flamands. En l’absence d’armoiries, il est impossible d’identifier le donateur. Par contre, le vêtement épiscopal et le coeur dans la main permettent de reconnaître saint Augustin, un des pères de l’Église, évêque d’Hippone, patron des théologiens et des imprimeurs. La crosse et la tiare indiquent son pouvoir pastoral et doctoral, la chape et le médaillon figurant le Christ debout entouré de rayons, le pouvoir sacerdotal. Selon la coutume, l’évêque porte la crosse tournée vers l’arrière, dans les églises où il n’a pas juridiction. Notre gentilhomme, richement habillé, chaussé de poulaines, daguet à la ceinture et livre de prières en mains, serait-il imprimeur ou se prénommerait-il Augustin ou Auguste ? Toujours est-il que le peintre a décrit avec minutie les fourrures, les velours et les broderies, sans négliger la tiare et la crosse épiscopales, ni même le paysage. De nombreux éléments sont d’ailleurs là aussi repris des panneaux du retable de Saint-Vaast. Par exemple, le visage de saint Augustin ressemble à celui de l’abbé du Clercq : un homme d’âge mûr, au visage marqué par les rides, au long nez dominant une bouche étroite et au menton creusé d’une fossette. Les personnages du Nouveau Testament et les donateurs sont vêtus d’une manière contemporaine, représentés avec soin. Ainsi les fidèles, même les plus illettrés, pouvaient s’identifier à l’Église, les figures de l’Ancien Testament portant quant à eux des vêtements orientaux de fantaisie. Le souci réaliste ne cessera de se développer dans la peinture flamande. Bientôt, le portrait du bourgeois, seul ou avec sa famille, se passera de tout prétexte religieux... Anne Foster www.gazette-drouot.com

Mercredi 17 décembre, salle 1-7 - Drouot-Richelieu, à 15 h. Piasa SVV. Cabinet Turquin.

Commentaires