Amos Gitaï @ Palais de Tokyo
Amos Gitaï, Rose à crédit, 2010. Extrait de film. Courtesy Palais de Tokyo © Amos Gitaï
Avec une oeuvre inaugurée voici près de trente ans, Amos Gitaï est salué dans le monde entier comme l'un des grands cinéastes de notre temps. Traversés par la question de l'identité et de l'exil, de la mémoire et de l'Histoire, ses films engagent une réflexion sur le passé et le présent, sur la nécessité de la transmission et sur le rôle de l'art.
Aujourd'hui, le cinéaste poursuit ce questionnement en proposant, pour le Palais de Tokyo, une vaste installation conçue comme une expérience émotionnelle et intime au sein d'une histoire collective. Investissant le sous-sol, il crée une promenade visuelle et sonore d'une densité exceptionnelle dans des images extraites de douze de ses films.
«Traces» a été montrée dans sa première version dans le cadre de la manifestation culturelle evento à Bordeaux. Dans ces murs en ruines et désaffectés, où furent regroupés les biens juifs spoliés lors de la Seconde Guerre mondiale, c'est la violence de l'Histoire et de ses échos qu'il s'agit pour lui d'évoquer. Juxtaposant images et sons, d'une foule scandant «Mussolini» lors de la campagne électorale de la petite-fille du Duce au silence d'une vidéo tournée à Auschwitz, des convulsions du Proche Orient à la valse tendre d'un vieux couple à la veille de son arrestation, le parcours proposé par le cinéaste interpelle et ébranle.
Il suscite en chacun de nous une réflexion personnelle sur les xénophobies qui déshumanisent les destins individuels. Amos Gitaï construit ainsi, dans l'atmosphère puissante et mystérieuse du bâtiment, les conditions sensibles d'une transmission de la mémoire des lieux et des événements.
Après Sophie Calle en octobre 2010, le Palais de Tokyo invite le cinéaste Gitaï à investir les sous-sols en friche du Palais de Tokyo. Construit en 1934 pour l'exposition internationale de 1937 par les architectes Jean-Claude Dondel, André Aubert, Paul Viard et Marcel Dastuque, le Palais est constitué de deux bâtiments monumentaux en arc de cercle, relié par un portique. Deux escaliers descendent vers le plan d'eau.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, les sous-sols sont utilisés pour entreposer les biens juifs placés sous séquestre. Dans les années 1950, l'aile Est fait l'objet de travaux importants qui permettent l'ouverture en 1961 du Musée d'art moderne de la Ville de Paris, constitué à partir des oeuvres du Petit Palais. L'aile Est du Palais abrite aujourd'hui le Musée d'art moderne et l'Arc. L'aile Ouest, qui hébergeait La Femis, accueille depuis 2002 le Palais de Tokyo — site de création contemporaine, dédié à la jeune création française et internationale.
Les sous-sols laissés en l'état de friche depuis 1995 font aujourd'hui l'objet d'un grand projet de réhabilitation dotant ainsi prochainement
Paris d'un espace culturel et artistique dédié à l'innovation et aux artistes confirmés de la scène française. L'installation réinvestit ce lieu et ses murs, support de projection des films dans un écho sonore et puissant.
Les films
— Au nom du Duce (1994)
— Plus tard / Later (2008)
— Roses à crédit (2010)
— La guerre des fils de lumière contre les fils des ténèbres (2009)
— Efratia Gitai: correspondance 1929-1994
— House (1980)
— Berlin-Jérusalem (1989)
— Golem, l'esprit de l'exil (1991)
— Dans la vallée de la Wupper (1993)
— Free Zone (2005)
— Terre promise (2004)
— Carmel (2009)
— Brand New Day (1987)
— This is the End / Auschwitz Collection (1992)
05 fév.-10 avril 2011. Palais de Tokyo www.palaisdetokyo.com
Amos Gitaï, Free Zone, 2005. Extrait de film. Courtesy Palais de Tokyo © Amos Gitaï