Elisabeth Vigée-Lebrun (Paris 1755-1842). « Portrait de la princesse de Lamballe ».
Elisabeth Vigée-Lebrun (Paris 1755-1842). « Portrait de la princesse de Lamballe ». Photo Audap & Mirabaud - Paris
Toile de forme ovale. Signée en bas à droite et datée, à la plume : Lse. Vigee LeBrun f 1782.; 78 x 64 cm - Estimation : 30 000 / 40 000 €
Provenance :- Collection du Prince Tuffiakin avant 1845 (d'après Pierre de Nolhac).
- Sa vente Paris 2-7 avril 1845, n° 40.
Bibliographie : - Pierre de NOLHAC : Madame Vigée-Lebrun, peintre de Marie-Antoinette, (Paris, 1912) ; (Portrait présumé de la princesse de Lamballe, coiffée d'un chapeau de paille) p. 137.
- André BLUM : Madame Vigée-Lebrun, peintre des grandes dames du XVIIIe siècle, (Paris, 1919), cité pp. 24-25 (non repr.).
- Geneviève HAROCHE-BOUZINAC : Elisabeth Vigée-Le Brun, Souvenirs (1755-1842), (Paris, 2008), pp. 177-178 (non repr.).
En 1782, Elisabeth Vigée-Lebrun profita d'un séjour en Flandre pour étudier les tableaux de Rubens et fut très impressionnée par le Chapeau de paille découvert dans la galerie d'un amateur à Anvers : “ Ce tableau me ravit et m'inspira au point que je fis mon portrait à Bruxelles en cherchant le même effet ”.
Elle se représenta donc coiffée d'un chapeau de paille orné d'une plume et d'une guirlande de fleurs des champs, une palette à la main. La même année, elle fit les portraits de la princesse de Lamballe et de la duchesse de Polignac. La “tendre amitié” qui existait entre elles et la reine a été soulignée par Madame Campan, femme de chambre de Marie-Antoinette.
Elle les peignit toutes deux coiffées du chapeau de paille qui révèle l'excellence du pinceau capable de transcrire les jeux de la lumière.
Le talent de l'artiste apparaît pleinement dans le traitement des plumes, des rubans et du plissé de la robe.
Née en 1749 à Turin, Marie-Thérèse-Louise de Savoie-Carignan épousa le fils du duc de Penthièvre, Louis-Stanislas, prince de Lamballe en 1767. Son premier passage à la cour fut bref : veuve dès l'année suivante, elle la quitta pour rester auprès de son beau-père qui la traita comme sa propre fille. Revenue à Versailles pour les fêtes du mariage du dauphin avec Marie-Antoinette le 16 mai 1770, elle se lia d'amitié avec la nouvelle reine qui rétablit pour elle la charge de surintendante de sa Maison en 1775.
Au décès de l'impératrice Marie-Thérèse, à la fin de l'année 1780, la reine pendant plusieurs jours ne sortit que pour entendre la messe, ne vit que la famille royale et ne reçut que la princesse de Lamballe et la duchesse de Polignac, raconta Madame Campan.
Avec elles, elle espéra la naissance d'un fils.
Louis XVI cita la princesse de Lamballe parmi les proches introduits dans la chambre de la Reine avant la naissance du Dauphin en 1781 :
Pendant le travail, il n'y avait dans la chambre que Mme de Lamballe, M. le comte d'Artois, mes tantes, Mme de Guéménée.
De ses favorites, c'est la princesse de Lamballe que Marie-Antoinette choisit comme confidente et soutien lors des événements révolutionnaires.
Quand la famille royale s'installa aux Tuileries en novembre 1790, Madame de Lamballe occupa au pavillon de Flore un appartement de plain-pied avec celui de la reine. Madame Campan se souvint encore que le 20 juin 1792 la reine n'avait pu parvenir jusqu'au roi; elle était dans la salle du conseil et on avait eu de même l'idée de la placer derrière la grande table, pour la garantir autant que possible de l'approche de ces barbares.
Dans cette horrible situation, conservant un maintien noble et décent, elle tenait le dauphin devant elle, assis sur la table. Madame était à ses côtés : Madame la princesse de Lamballe, la princesse de Tarente, mesdames de La Roche-Aymon, de Tourzel (gouvernante des enfants de France) et de Mackau l'environnaient...
C'est par un billet de la reine que la princesse de Lamballe apprit la fuite à Varennes dans la nuit du 20 juin 1791: Mon cœur, nous serons déjà bien éloignés de la détestable ville de Paris, quand vous parviendront ces lignes.
Il était nécessaire que nous gardions le secret sur notre départ. Tâchez de vous sauver le plus vite possible, car un massacre pourrait bien être la conséquence de cette démarche longtemps préméditée et qui doit avoir pour résultat le rétablissement du pouvoir royal.
Aussitôt la princesse partit pour l'Angleterre mais, apprenant dès son arrivée à Douvres l'arrestation de la famille royale, elle s'exila à Aix-la-Chapelle.
A la demande de Marie-Antoinette, elle revint à ses côtés, non sans avoir pris la précaution de rédiger son testament, consciente des risques qu'elle prenait.
Elle était donc là le 10 août 1792 quand le roi partit à l'Assemblée, disant à ses ministres et aux personnes qui l'entouraient : « Allons, Messieurs, il n'y a plus rien à faire ici ».
La reine, sortant du cabinet du roi, s'adressa alors à Madame Campan, lui disant:
« Attendez dans mon appartement ... » et n'emmena avec elle que Mme la princesse de Lamballe et Mme de Tourzel. La princesse de Tarente et Mme de La Roche-Aymon se désolaient d'être laissées aux Tuileries.
Dès lors, les choses allèrent vite : dans la nuit du 19 au 20 août, la princesse de Lamballe, fut enlevée et transférée à la prison de la Force où elle fut massacrée en septembre 1792.
Nous remercions Joseph Baillio qui a confirmé l'attribution de notre portrait après examen, il sera inclus dans le catalogue raisonné à paraître.
Audap & Mirabaud - Paris. Lundi 7 novembre 2011. Drouot Richelieu - Salle 5 - 9, rue Drouot - 75009 Paris. Tel. 01 53 30 90 30.