Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Alain.R.Truong
Alain.R.Truong
Publicité
Visiteurs
Depuis la création 50 892 196
Archives
Newsletter
Alain.R.Truong
6 mai 2016

L’Empereur Commode en gladiateur par Stefano Maderno (Rome ?, 1570- Rome, 1636), Rome, vers 1625

1

2

3

Lot 31. L’Empereur Commode en gladiateur par Stefano Maderno (Rome ?, 1570- Rome, 1636), Rome, vers 1625. Estimation : 70 000 € / 100 000 Photo Kohn Marc-Arthur SVV.

Marbre de Carrare - H. 98 cm, L. 32 cm, P. 52 cm   

Cette œuvre en marbre blanc est tirée de la célèbre sculpture antique d’époque impériale romaine de dimension colossale (287 cm de haute) découverte à Rome dans le frigidarium des thermes de Caracalla et aujourd’hui conservée au Musée archéologique national de Naples. 

À l’époque de Stefano Maderno, cette sculpture se trouvait dans la Cour du Palais Farnèse, lieu alors très fréquenté par des sculpteurs en quête de références antiques. Lors de sa découverte, les érudits de la seconde moitié du XVIe siècle s’entendirent pour déclarer que la sculpture romaine représentait un gladiateur. Présentant des manques importants au niveau de la tête, les Farnèse la firent restaurer sous les traits de l’Empereur Commode, passionné de combats, qui se prenant pour Hercule, participa régulièrement et activement aux jeux du cirque. De fait, les inventaires du palais Farnèse au XVIe siècle citent le groupe comme « Commodo in fogia di gladiatore ». 

Stefano Maderno a réalisé à partir de ce groupe antique une petite terre cuite (20 cm de haut) d’une grande sensibilité, aujourd’hui conservée à la Ca’ d’Oro de Venise et qui eut un rôle important dans la propagation du thème à la période néoclassique auprès notamment d’Antonio Canova avec son Hercule et Lichas , de John Flaxman avec La Folie d’Athamas ou de Clodion avec Le Déluge. 

Notre marbre, présentant ici l’Empereur Commode seul, est directement tiré de cette terre cuite et fut probablement une commande auprès du sculpteur d’un riche amateur romain dans une optique de sculpture de galerie, compte tenu de sa dimension. Bien que le sujet ait été modifié par rapport à la terre cuite, nous sommes bien en présence d’une oeuvre de Maderno et non d’une traduction tardive. En effet, le style correspond en tous points avec ses autres sculptures réalisées en marbre, notamment Sainte Cécile, dans le traitement de la draperie, des anatomies et de la chevelure. Iconographiquement, notre marbre suit fidèlement la représentation antique. À noter que l’auteur ne présente pas la figure compliquée de l’enfant. Il en résulte le geste bizarre du gladiateur, qui fonctionne parfaitement du point de vue principal (celui consacré par les gravures d’après l’original antique), mais qui est incongru quand on tourne autour de la sculpture: il semble que ce féroce guerrier se touche les lèvres en signe de perplexité ou qu’il soit assailli par un doute soudain; il n’y a pas ici d’intention iconographique, juste la nécessité technique pour le sculpteur de relier statiquement le bras, avec un pont, à la figure. 

Cette prise de liberté semble inimaginable pour un artiste de cette envergure et pourtant la qualité de la sculpture atteste que nous n’avons pas affaire à un maître secondaire. L’explication est donc à chercher dans les limites de Stefano Maderno, comme l’a écrit Claude Douglas Dickerson, « in effect, Maderno let the marble dictate his sculpture, indicating that he possessed neither the imagination, nor the technical means to make the marble submit to his artistic will. He was no Bernini » (Bernini and Before : Modeled Sculpture in Rome, ca. 1600-1625, Institute of Fine Arts, New York 2006, p. 298, 299). 

Maderno, au style discret et délicat, fut éclipsé par le génie de Gian Lorenzo Bernini (1598-1680). Peut-être a-t ’il cherché à rivaliser avec le David que le Bernin sculpta entre 1623 et 1624 en se risquant à isoler la figure de Commode en marbre, ce qui a engendré de tels surprenants résultats. 

Toujours est-il que cette oeuvre est d’une grande rareté et d’une qualité de sculpture exceptionnelle, oscillant entre l’imitation de l’antique et l’apparition du nouveau language baroque.

KOHN Marc-Arthur SVV. Tableaux Anciens Haute Époque - Renaissance Objets d’Art et Mobilier. Mercredi 11 mai, salle 5 - Drouot-Richelieu.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité