"Un bestiaire mécanique. Horloges à automates de la Renaissance" à la galerie Kugel
Un bestiaire mécanique. Horloges à automates de la Renaissance. Affiche.
PARIS - La Galerie Kugel présente du 9 septembre au 5 novembre la première exposition entièrement consacrée aux horloges à automates de la Renaissance conçus entre 1580 et 1630. Plus de trente automates peuplent l’exposition, constituant ainsi la plus grande collection jamais assemblée. On y découvre une ménagerie d’animaux exotiques : lions, dromadaires, éléphants, ours, singes... À chaque heure ou bien à la demande, les mécanismes des automates s’activent : une gueule féroce s’ouvre, une langue sort, une patte se lève, une queue se balance, tandis que les yeux roulent au rythme de l’horloge.
Si les animaux prédominent au royaume des automates, on y croise également des personnages singuliers, notamment un turc à cheval brandissant son cimeterre et des dompteurs d’ours et de lion tirant sur leur corde.
De l’époque d’Homère à celle des robots, l’Homme a toujours rêvé de donner vie à un être artificiel. À la fin du Moyen-Âge, le développement de l’horlogerie permit la création des premiers automates, situés à la croisée de la science et des arts. À la Renaissance, ce rêve s’incarna en de luxueuses horloges en forme d’animaux ou de personnages en bronze doré, destinées au plaisir des princes.
Ces merveilleux objets combinant l’art de la sculpture, de l’horlogerie et parfois de l’ébénisterie, furent réalisés pour l’essentiel dans la ville d’Augsbourg, alors principal centre artistique germanique. Rivalisant de fantaisie et d’ingéniosité, ils fascinèrent les cours européennes. On les retrouve aujourd’hui dans les plus grands musées historiques : Vienne, Dresde et Munich. Ils servirent parfois de précieux cadeaux diplomatiques. À partir du milieu du XVIe siècle, des horloges automates furent régulièrement envoyées au sultan à Istanbul, dans le cadre du tribut annuel dont l’Empire s’acquittait pour préserver la paix. Au XVIIe siècle, des automates furent offerts, parmi d’autres horloges et curiosités scientifiques, à l’empereur de Chine par les prêtres jésuites qui souhaitaient, par ce geste, propager les idées chrétiennes en Asie.
Près de 400 ans après sa création, ce bestiaire mécanique continue de nous émerveiller.
À lire : le catalogue de l'exposition, éd. Monelle Hayot, IBSN 978-2-903824-96-9, 59 €
Exposition en accès libre, du lundi au samedi de 10h30 à 19h.
Fermetures exceptionnelles le mercredi 12 octobre et le mardi 1er novembre 2016.
Horloge à automate figurant un ours et son dresseur turc, Augsbourg, vers 1580-1590, bronze et cuivre dorés, H. 33 cm. ©PIXIS
Horloge à automate en forme de lion dit « passant », bronze et cuivre dorés, socle marqueté de bois de violette, palmier et filets d’étain, Augsbourg, vers 1620-1630, H. 29,5 cm. ©PIXIS
Ici, le boîtier du mécanisme et d’accueil des cadrans a pris l’apparence d’un précieux coffret d’ébénisterie. Ouvrant la gueule toutes les heures ou bien à la demande et roulant des yeux au rythme du balancier interne, le lion pose la patte sur un écu aux armes d’une puissante famille italienne, les del Buffalo.
Horloge à automate figurant un éléphant, Augsbourg, vers 1580-1590, bronze et cuivre dorés, H. 33 cm.© PIXIS
Spectaculaire, cette pièce offre des similitudes avec une horloge des collections Esterhazy au château de Forstenstein (Autriche) portant le poinçon d’un horloger reçu maître en 1571 à Augsbourg, Erasmus Pirenbrunner. Ce dernier pourrait être l’auteur de cette horloge à automate évoquant les éléphants antiques et ceux, plus contemporains, des parades liées à l’exploration du monde à la Renaissance. Le pachyderme peut bouger sa trompe et rouler des yeux, tandis que le bras du cornac s’anime et que tourne la plate-forme de la tourelle abritant, autour du timbre, huit soldats turcs.
Horloge à automate figurant un Turc, Augsbourg, vers 1590-1600, bronze et cuivre dorés, H. 39 cm. © PIXIS
Personnage redouté des Européens, le Turc est figuré ici muni de son cimeterre et vêtu d’un riche costume traditionnel. À chaque heure, il lève son arme et secoue la tête. Tenue dans son bras gauche, la hampe creuse transmet un mouvement au globe gravé d’étoiles et du chiffre des heures.
Horloge à automate figurant un singe, Augsbourg, vers 1620-1630, bronze et cuivre dorés, H. 33 cm. ©PIXIS
Dans le bestiaire cher aux horloges à automate, le singe, aux côtés du lion, de l’éléphant et de l’autruche, tenait une place de choix, le griffon et la licorne occupant le registre des animaux fabuleux. Carl Schmidt, reçu maître horloger en 1590 à Augsbourg et disparu vers 1635, pourrait être l’auteur de cette version.
Nikolaus Schmidt, Horloge à automate figurant un cavalier, Augsbourg, vers 1585-1595, bronze et cuivre dorés, H. 29 cm. ©PIXIS
Seuls trois modèles d’horloges à automate figurant un cavalier sont aujourd’hui connus. Leur rareté pourrait être due au fait que le cheval réclamait, pour être traduit dans une ronde-bosse de qualité naturaliste, un fin modèle de sculpteur. Cette horloge porte le poinçon de Nikolaus Schmidt, horloger né à Wiltz (Luxembourg) vers 1550 et attesté maître en 1576 à Augsbourg. Elle provient des collections d’un musée privé.
Horloge à automate en forme de lion dit « passant », bronze et cuivre dorés, base en ébène, Augsbourg, vers 1635-1640, H. 29,5 cm. ©PIXIS
Cette horloge à automate ornée du lion ailé de l’évangéliste saint Marc, patron de Venise, fut probablement réalisée par l’horloger Hans Ferdinand Mehrer qui, bravant les règles corporatives, s’installa à Venise et conçut des horloges pour la clientèle italienne. Pour cela, il fut sanctionné en 1640 avec son maître, Johann Ott Alleicher. La vogue de ces horloges à automate faiblit néanmoins dès les années 1630, au profit d’une recherche, dans les instruments du temps, d’une plus grande précision.