"Roux ! De Jean-Jacques Henner à Sonia Rykiel"
PARIS - Le musée national Jean-Jacques Henner consacre sa prochaine exposition temporaire au thème de la rousseur et plus précisément à la chevelure rousse, emblématique de la peinture de Jean-Jacques Henner (1829-1905), qui en fait sa signature.
Du 30 janvier au 13 mai 2019, un ensemble éclectique de peintures, croquis de mode, affiches, photographies, dessins, masques, films…, sera exposé en regard des tableaux du peintre. En cinq sections, l’exposition réunit une centaine d’oeuvres et montre différents aspects de la rousseur. Sans prétendre à l’exhaustivité, elle souligne l’importance de cette couleur tellement distinctive à travers des oeuvres qui ne manqueront pas d’étonner et de détonner !
Cette exposition d’oeuvres venues d’univers différents permet d’évoquer l’imaginaire et les préjugés autour de la rousseur, qui fascine et dérange à la fois. Pour l’occasion, elle a bénéficié de prêts importants provenant de nombreux musées (Orsay, Arts décoratifs, Petit Palais, Beaux-arts de la Ville de Paris, MuCEM, Quai Branly-Jacques Chirac), de la Comédie Française, de collections particulières dont celle de Nathalie Rykiel, ainsi que de la photographe Geneviève Boutry.
Jean-Jacques Henner, Madeleine en prière, 1889, Paris, musée national Jean-Jacques Henner. Photo @ RMN-GP / Adrien Didierjean
Rousses
L’exposition s’ouvre avec la première rousse de Jean-Jacques Henner, Idylle de 1872, et quelques tableaux qui permettent de comprendre comment l’artiste a généralisé le roux dans son oeuvre, quel qu’en soit le sujet. Cette section permet également d’aborder la thématique du portrait avec La Comtesse Kessler à la chevelure flamboyante mise en perspective avec Jeune femme à la rose d’Auguste Renoir et l’énigmatique Femme à l’orchidée d’Edgard Maxence et des photographies actuelles de Geneviève Boutry. À la suite, le visiteur est convié à une promenade à travers la littérature (Baudelaire, Zola, Maupassant…) et les icônes rousses du xlxe siècle.
Jean-Jacques Henner, Idylle, 1872, Paris, musée d’Orsay. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt
Jean-Jacques Henner, La Liseuse, 1883, huile sur toile, Paris, musée d’Orsay en dépôt au musée national Jean-Jacques Henner. © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.
Jean-Jacques Henner, La Comtesse Kessler, vers 1886, huile sur toile, Paris, musée national Jean-Jacques Henner. © RMN-Grand Palais/Franck Raux.
Pierre Auguste Renoir, Jeune femme à la rose, entre 1918 et 1919, huile sur toile, Paris, Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris. © Petit Palais/Roger-Viollet.
Edgard Maxence, Femme à l’orchidée, vers 1900, huile sur toile, Paris, musée d’Orsay. © RMN-Grand Palais (musée d’Orsay) / image RMN-GPADAGP, 2018
Geneviève Boutry, Lauriane, 2009, photographie argentique, tirage sur papier, collection de l’artiste. © Geneviève Boutry.
Geneviève Boutry, Les Trois Soeurs, 2009, photographie argentique, tirage sur papier. © Geneviève Boutry.
La force d’une couleur
La confrontation des oeuvres de Jean-Jacques Henner, des masques de Papouasie Nouvelle Guinée et des créations rendant hommage à Sonia Rykiel, souligne la force d’une couleur, « couleur qui se voit et fait écart avec les autres », comme l’écrit si justement Michel Pastoureau au sujet de l’orangé.
Papouasie-Nouvelle-Guinée (Nouvelle-Irlande), masque Kepong, xxe siècle, bois, fibres végétales, pigments, opercule de turbo, Paris, musée du Quai Branly-Jacques Chirac. Photo @Patrick Gries / Bruno Descoings.
Maison Martin Margiela, Création spéciale pour Sonia Rykiel, 2008, veste constituée de six perruques aux cheveux crêpés roux, collection privée Nathalie Rykiel. © Frédérique Dumoulin
Rousseur et préjugés
De tout temps, les roux ont suscité des réactions mêlant fascination et répulsion. Cette section présente l’imaginaire autour du roux et ses multiples aspects : séduction (Sarah Bernhardt, Loïe Fuller), rire (clowns) et peur (ogres)… Un focus original est également porté sur les héros de l’enfance, de Poil de Carotte à Spirou.
Quelques traits de sanguine
Les dessins de Jean-Jacques Henner ont la part belle dans cette exposition. La sanguine est pour lui le média idéal pour faire flamboyer la chevelure d’Andromède, de Judith et de La Vérité jusqu’au déroutant Christ mort. En contrepoint, figurent les croquis au feutre réalisés pour le défilé-hommage à Sonia Rykiel en 2008 par Jean-Charles de Castelbajac, Jean-Paul Gaultier et Martin Margiela. Le noir et le roux claquent ici comme un drapeau.
Jean-Jacques Henner, Femme rousse, vers 1900, carré Conté et sanguine sur papier ligné collé sur papier bleu collé dans un carnet, Paris, musée national Jean-Jacques Henner. © RMN-Grand Palais/Tony Querrec.
Jean-Paul Gaultier, Création spéciale pour Sonia Rykiel, 2008, feutre sur papier, collection privée Nathalie Rykiel. © Jean-Paul Gaultier.
Pourquoi tant de roux ?
S’interroger sur les raisons de la prédilection de Henner pour la rousseur, invite à entrer dans l’atelier du peintre. Il y faisait poser des modèles, qui n’étaient pas toutes rousses, et multipliait les esquisses. De l’inquiétante Hérodiade à la repentante Madeleine en passant par la sensuelle Vérité : presque toutes sont rousses ! Le plus original dans cette production sont les Christ roux qui intriguent alors que cette couleur est habituellement associée au traître Judas.
Jean-Jacques Henner, Figures féminines, entre 1872 et 1879, huile sur carton, Paris, musée national Jean-Jacques Henner. © RMN-Grand Palais/Tony Querrec.
Jean-Jacques Henner, Camille Merval, vers 1886 ?, huile sur bois, Paris,musée national Jean-Jacques Henner. © RMN-Grand Palais/Adrien Didierjean
Jean-Jacques Henner, Le Christ au linceul, 1896, huile sur toile, Paris, musée national Jean-Jacques Henner. © RMN-Grand Palais/Franck Raux.
30 janvier-20 mai 2019
Jeune femme à la chevelure rousse, Musée national Jean-Jacques Henner. Photo © Jalo, Paris.