La Collection Marceau Rivière offerte chez Sotheby's le 19 juin à Paris
PARIS - Sotheby’s a l’honneur de dévoiler la collection d’art africain de Marceau Rivière, grand défenseur des arts d’Afrique, expert et marchand, mais, avant tout, éminent historien de l’art. Pendant plus de 50 ans, cet homme discret a réuni plusieurs centaines d’œuvres que Sotheby’s mettra en vente le 19 juin à Paris.
Selon Alexis Maggiar, directeur Europe pour le département des arts d’Afrique et d’Océanie, Sotheby’s : « Lorsque que Marceau Rivière me fit l’honneur d’ouvrir les portes de son appartement il y a quelques années, la découverte fut sidérante. Sa collection, préservée à l’abri des regards depuis plus d’un demi-siècle, s’est d’emblée imposée à mes yeux comme l’une des plus remarquables et des plus complètes en art d’Afrique. Une collection guidée sa vie durant par la beauté, la passion et la connaissance que nous sommes particulièrement honorés de défendre chez Sotheby’s. »
Si Marceau Rivière est l’un des plus importants collectionneurs dans ce domaine, il s’affirme par sa formation et son approche d’historien de l’art, ayant consacré une part majeure de son parcours à la recherche et à l’écriture. Ses livres ont ainsi contribué à faire redécouvrir un grand nombre d’artistes, en particulier ceux de Côte d’Ivoire. Pendant plus de cinquante ans, Marceau Rivière sera l’un des plus fervents défenseurs de l’art africain ; un art qu’il n’a eu de cesse de mettre sur le devant de la scène et de transmettre au plus grand nombre.
Exceptionnelles aussi sont son approche instinctive des œuvres d’art et sa sensibilité artistique qui ont présidé à la constitution de sa collection privée.
Sa fascination pour l’Afrique naît dès l’enfance, lors de la projection d’un film sur le Congo par un missionnaire de passage dans sa région, et ne le quittera plus jamais. Sa collection débute dès son plus jeune âge. Il achète son premier masque à l’âge de onze ans – objet qu’il a toujours conservé. En 1957, il est incorporé comme méhariste en Algérie et débute ses premières missions pour le musée national du Bardo d’Alger. A partir de 1961, démobilisé, il intègre la compagnie UTA comme ingénieur-technicien. Son nouveau métier lui permet de vivre en Afrique et, en particulier au Tchad, berceau de la civilisation Sao. Pendant plus de vingt ans, sa profession le fait voyager sur tout le continent africain, nouant partout des relations amicales avec les chefs de villages dont il étudie sur place les arts et les coutumes. C’est à cette époque qu’il constitue les prémices de la vaste et riche collection qui existe aujourd’hui. En 1975, il écrit son premier livre sur Les Chefs-d’œuvre africains des collections privées françaises, qui dès sa publication lui confère une réputation internationale et sera traduit en anglais et allemand. De nombreux ouvrages de références suivront.
Il rencontre aussi les collectionneurs européens résidant sur place : Paul Delcourt, André Blandin, Maître Loiseau, Philippe Guimiot et Jacques Kerchache, Pierre Dartevelle, Alain Dufour. Son réseau prend rapidement de l’ampleur et, dès les années 1970, il commerce avec les plus renommés collectionneurs et les marchands.
Ses amis sont tous de grands collectionneurs ou défenseurs de l’Art Africain au premier rang desquels Merton Simpson, Maurice Nicaud, Samir Borro, Willy Mestach, Robert Duperrier, Henri Kamer et René Rasmussen.
Après avoir quitté l’aviation, il se consacre entièrement à sa passion. Il enrichit sa collection en achetant, auprès de ses confrères marchands et en ventes publiques, des œuvres aux provenances prestigieuses issues des collections Vérité, Rubinstein, Guillaume ou Ratton. En 1981, il ouvre à Paris rue Saint-Benoit, la galerie Sao en souvenir de son séjour au Tchad, lieu de rendez-vous des amateurs du monde entier.
Aux chefs-d’œuvre des arts de Côte d’Ivoire - Baulé, Dan et Guro - qui en constituent la trame répondent des icônes de l’art Fang, Kota, Kongo et bien d’autres encore. Chacune de ces pièces témoigne du génie individuel de leurs sculpteurs et des institutions qui nourrirent leur imaginaire, et conte également l’histoire de leur découverte par l’Occident, au début du XXe siècle.
Cette collection exhaustive sur les arts d’Afrique s’impose comme l’une des toutes dernières historiques dans ce domaine, et témoigne d’une vie de passion dévouée à l’Afrique et ses trésors.
Masque, Baulé, Côte d'Ivoire. Haut. 22,5 cm. Courtesy Sotheby's.
Provenance: Collection Marceau Rivière, Paris, acquis ca. 1972
Symbole métaphorique de la « lune », ce masque rond s’inscrit dans un corpus rarissime d’œuvres apparaissant à l’ouverture des cérémonies Baulé. Paroxysme de l’abstraction de la figure humaine, le visage s’inscrit dans un cercle parfait auquel répondent, en écho, les demicercles de la coiffure, des sourcils et des yeux dans un modelé parfaitement équilibré. D’une pureté absolue, ce masque illustre le génie individuel d’un artiste qui a su puiser dans le répertoire traditionnel de l’art Baulé pour créer un chef-d’œuvre intemporel.
Statue, Bété, Côte d'Ivoire. Haut. 64 cm. Courtesy Sotheby's.
Icône de ce corpus, cette statue affirme l’intensité d’une esthétique basée sur la puissance qui atteint ici un degré unique d’aboutissement. Les formes simples accentuent l’élongation du corps dans un axe vertical et concentre l’attention sur le visage à l’expression intense.
Masque, Baulé, Côte d'Ivoire. Haut. 35 cm. Courtesy Sotheby's.
Caractéristique de l’art Baulé, cette œuvre s’impose comme l’un des chefs-d’œuvre du corpus des masques portraits ndoma. Clôturant les cérémonies de divertissement, ils magnifiaient l’ensemble des critères de beauté Baulé dont le traitement est ici soigné à l’extrême. A la finesse des traits du visage répond la délicatesse de la coiffe ajourée surmontée d’un peigne à quatre branches et de la barbe stylisée. S’ajoutent les clous et les triangles de laiton – succédané de l’or – qui magnifient la qualité de la sculpture.
Oracle, Baulé, Côte d'Ivoire. Haut. 29,5 cm. Courtesy Sotheby's.
Acquis dès le début du XXe siècle, cet oracle fait partie d’un ensemble restreint de six œuvres qui dans un aboutissement esthétique suprême associent la traditionnelle boîte à une figure humaine. Le devin est ici représenté en position d’attente et exprime l’ensemble des canons de l’art Baulé. Par l’ensemble de ses qualités cette œuvre est le pendant directe de celle conservée au Pavillon des Sessions elle aussi acquise par Hans Himmelheber (inv. N° 71.1933.132.1).
Masque, Guro, Côte d'Ivoire. Haut. 29,5 cm. Courtesy Sotheby's.
Provenance: Collection Marceau Rivière, Paris, acquis ca. 1978.
Pièce majeure au sein de son corpus, ce masque illustre superbement l'essentielle expression de la perfection placée au cœur de l'art Guro. L’éloquente beauté unissant les critères de l’esthétique Guro se traduit ici de façon intense : étroit visage au haut front bombé, coiffure complexe dessinant sur le front un motif au contour dentelé en arabesque, arrête étroite du nez exaltée par le sensible jeu de lignes tendues vers la bouche ouverte, aux dents délicatement taillée. S’ajoutent les scarifications qui signifiait le haut rang de la figure représentée et renforcent sa beauté incomparable.
Cuillère, Dan, Côte d'Ivoire. Haut. 52 cm. Courtesy Sotheby's.
Œuvre majeure de l’art Dan, cette cuillère anthropomorphe s'impose comme le chef-d’œuvre d’un ensemble déjà célébré pour ses proportions imposantes et son inventivité formelle. Insigne de dignité, elle personnifie la beauté féminine, traduisant à la perfection les critères fondamentaux de l'esthétique des Dan, à la fois dans les formes et dans le soin apporté à la parure. Transcendant les caractéristiques classiques du corpus, l’artiste est ici parvenu à atteindre l’équilibre parfait du rapport formel entre œuvre et objet, entre statuaire et réceptacle.
Figure de reliquaire, Kota Mahongwe, Gabon. Haut. 39 cm. Courtesy Sotheby's.
« Les Kota-Mahongwe ont poussé à l’extrême les principes sculpturaux de leurs voisins Kota. L’abstraction de leurs figures funéraires est tout à fait prodigieuse » (Perrois in Arts d’Afrique Noire, n° 20, 1976, p. 36).
Dans cette œuvre, l’artiste est parvenu par une admirable virtuosité à imposer la majestueuse présence de l'ancêtre. A travers un exercice de maîtrise des formes et de la matière, son génie s’illustre dans la tension harmonieuse des courbes, accentuée par le mouvement des fines lamelles de laiton et, au dos, dans l'élaboration abstraite du décor, individualisant l'ancêtre et accordant à l’effigie un surplus de valeur symbolique.
Vente le 19 juin 2019 - Exposition du 13 au 18 juin