"Trésors de Venise, la Collection Cini" à l'Hôtel de Caumont
AIX-EN-PROVENCE - À l’occasion du 70e anniversaire de la création de la Fondation Giorgio Cini, l'Hôtel de Caumont - Centre d'art propose un voyage à Venise en présentant pour la première fois hors d’Italie des chefs-d’œuvre de la collection Cini, l’une des plus importantes collections d’art ancien italien.
Les 70 peintures, sculptures, dessins et objets précieux présentés font partie de l’un des plus prestigieux ensembles d’art italien, du XIVe au XVIIIe siècle, réuni par l’entrepreneur et philanthrope Vittorio Cini (Ferrare 1885 – Venise 1977). Sa curiosité insatiable et les conseils avisés d’historiens de l’art prestigieux lui ont permis, en l’espace de 50 ans environ, de former une collection exceptionnelle tant par sa qualité que par la variété de techniques et de typologies d’objets. On y trouve des sculptures, gravures, dessins, objets de mobilier et des peintures sur bois ainsi que des porcelaines vénitiennes et des ivoires français, des miniatures et des volumes finement décorés.
En 1951, le collectionneur créa la Fondation Giorgio Cini, centre de recherche et formation de réputation internationale, à la mémoire de son fils, décédé prématurément. Aujourd’hui, la collection Cini se répartit entre la Galerie du Palazzo Cini, ancienne résidence du collectionneur sur le Canal Grande, et le siège de la Fondation Giorgio Cini, sur l’île de San Giorgio Maggiore.
Aux côtés des grands noms de la peinture toscane - comme Fra Angelico, Filippo Lippi, Piero di Cosimo, Jacopo da Pontormo - et vénitienne, comme Lorenzo et Giandomenico Tiepolo, l’exposition présente des pièces maîtresses de la Renaissance ferraraise. Complétée par une sélection de sculptures, émaux et ivoires, ainsi que par un choix de dessins et enluminures, l’exposition rend compte de toute la variété stylistique de l’art italien.
L’exposition présente également des créations contemporaines en dialogue avec les œuvres de la collection. Ces créations des artistes Ettore Spalletti ou encore Vik Muniz, réalisées à l’origine pour être exposées dans la Galerie du Palazzo Cini, témoignent du fait que la collection Cini est une source d’inspiration inépuisable pour les artistes d’aujourd’hui.
19 novembre 2021 - 27 mars 2022
Maître du Crucifix de la Fondation Giorgio Cini (Bologne, actif entre la huitième et la neuvième décennie du xiiie siècle), Christ crucifié, 1270-1280, Bois de saule sculpté en ronde bosse, polychromé et doré, 176 × 167 × 29 cm Fondazione Giorgio Cini, inv. 21042, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Ce grand crucifix en bois polychrome fait partie des importantes sculptures acquises par Vittorio Cini dans les années 1930 par l’intermédiaire de Nino Barbantini. C’est l’oeuvre d’un sculpteur bolonais actif entre 1270 et 1280, remarquable représentant du courant gothique naturaliste de la plaine du Pô, capable de réinterpréter la culture française tout en s’inspirant des nouveautés toscanes. Ce type de Crucifix était très courant dans les églises avant la transformation de la liturgie de la Contreréforme.
Giotto di Bondone, dit Giotto (Colle di Vespignano, 1267 – Florence, 1337), atelier, Deux apôtres, vers 1320, Tempera et feuille d’or sur bois, 42 × 31,7 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. 40060, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Acquis par Vittorio Cini sur le marché antiquaire florentin en 1965, ce petit panneau était connu de l’historien de l’art Bernard Berenson depuis 1936, qui l’avait attribué au siennois Luca di Tommè alors que l’historien Roberto Longhi le considérait comme une oeuvre de jeunesse de Taddeo Gaddi.
Plus récemment, Miklós Boskovits l’a restitué au corpus d’oeuvres de Giotto. D’après l’historien, le panneau serait le fragment d’une prédelle présentant la théorie des apôtres, réalisée par Giotto et son atelier sur le même modèle que la prédelle du retable Stefaneschi, exécuté dans les années 1320 pour l’autel de la basilique Saint-Pierre de Rome.
Maître du polyptyque de la chapelle Médicis, (Florence, actif dans la première moitié du XIVe siècle), La Vierge et l’Enfant sur un trône entre les saints Pierre et Paul et deux anges ; Saint Jean Baptiste et sainte Marie Madeleine dans le désert (à gauche) ; La Crucifixion (à droite), 1315-1320, tempera et feuille d’or sur bois, 38 × 38,5 cm (ouvert), Fondation Giorgio Cini, Galerie du palais Cini, inv. 40061, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Ce triptyque à volets mobiles, objet de dévotion privée typique des ateliers du xive siècle, est l’oeuvre raffinée d’un maître florentin anonyme. Il tire son nom de convention du retable de la Chapelle Médicis de l’Église Santa Croce de Florence, dont les fragments rassemblés au xixe siècle sont aujourd’hui visibles sur le maître autel de la basilique franciscaine.
La forme « à livre ouvert » de l’autel en marbre et la recherche du volume dans la représentation du corps de la Vierge témoignent de l’adhésion précoce du peintre au style de Giotto. La restauration à l’occasion de cette exposition a restitué la fraîcheur des couleurs et favorisé une plus grande lisibilité des détails les plus minutieux.
Taddeo Gaddi (Florence, vers 1300 – 1366), Saint Jean l’Évangéliste montant au ciel, vers 1353, tempera et feuille d’or sur bois, 32,8 × 36,3 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. 40004b, Venezia © Fondazione Giorgio Cini
Stefano di Giovanni, dit Sassetta, (Cortone, vers 1400 – Sienne, 1450), Vierge d’humilité, vers 1430, tempera et feuille d’or sur bois, 79,2 × 46 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. 40019, Venezia © Fondazione Giorgio Cini
Fra Filippo Lippi (Florence, vers 1406 – Spolète, 1469), La Vierge et l’Enfant entourés de saints et d’ anges avec un dévot, vers 1432, tempera sur bois, 47,1 × 36 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. 40013, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Ce tableau à l’iconographie rare, destiné à la dévotion privée, est une oeuvre de jeunesse de Fra Filippo Lippi. Il s’agit d’une Sainte Conversation entourée d’anges, au centre d’un édifice qui n’est pas sans rappeler les modèles de Leon Battista Alberti, célèbre architecte et humaniste.
Stylistiquement proche de l’art de Masaccio dans l’opulence des volumes, le panneau se caractérise par un traitement nuancé de la lumière, rehaussée par quelques touches dorées qui éclairent les drapés et parsèment d’étoiles la robe de la Vierge.
Fra Angelico, Saint Thomas d'Aquin, 1438-1440, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, Venezia
© Fondazione Giorgio Cini
Sano di Pietro (Sienne, 1405 – 1480), Christ rédempteur, 1442-1443, tempera et feuille d’or sur bois, 74 × 60,6 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. 40021, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Sculpteur lombard du XVe siècle, Déploration du Christ, milieu XVe siècle, Fondazione Cini, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Ercole de' Roberti, Saint Jérôme, 1470-1473, Fondazione Cini, Venezia © Fondazione Giorgio Cini
Luca Signorelli (?) (Cortone, vers 1450 – vers 1523), La Vierge et l’Enfant, vers 1470-1475, Tempera et huile sur bois, 61,8 × 53,3 cm, Fondazione Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. 40014, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
Attribué à Piero della Francesca ou Luca Signorelli, ce chef-d’oeuvre du Quattrocento est acquis par Vittorio Cini en 1958. Avant cette date, de nombreuses retouches avaient été apportées à la couche picturale, qui ont rendu particulièrement difficile son attribution. Belle et fière, la Vierge est baignée d’une lumière zénithale que rehausse le glacis. La virtuosité de certains détails justifie l’attribution au maître de San Sepolcro, comme l’ovale parfait du visage ou la restitution minutieuse et raffinée de l’ondulation du voile, de la coiffure et des velours. Cependant, l’attribution à Luca Signorelli, proposée par Bernard Berenson, s’est longtemps imposée dans les travaux des spécialistes. Le caractère linéaire prononcé et l’absence de la rigoureuse perspective qui caractérise les oeuvres de Piero sont compatibles avec les débuts d’un peintre encore à la recherche de son style propre, comme pouvait l’être son élève, Luca Signorelli à l’aube de sa carrière.
Michele Ciampanti, L'Adoration des bergers, vers 1475, Fondazione Cini, Galleria di Palazzo Cini, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini
Cosmè Tura (Ferrare, vers 1433 – 1495), Saint Georges, vers 1475-1480, huile sur bois, 21,6 × 13 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. VC 6269 (dépot des héritiers Guglielmi di Vulci), Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
Ce petit panneau peint par Cosmé Tura est l’un des joyaux de la Renaissance à Ferrare.
Dans une mise en scène audacieuse, il présente Saint Georges terrassant le dragon.
Une ligne dynamique, une utilisation des couleurs héraldiques - le rouge, le blanc et le vert sur les petites colonnes en matériaux précieux qui évoquent les armoiries des Este – et la gestuelle dansante du soldat révèlent l’expressionnisme propre à Tura, protagoniste incontesté de la période artistique riche, raffinée et expérimentale qu’a été la seconde moitié du Quattrocento (xve siècle) à Ferrare.
Domenico Bigordi, dit Ghirlandaio, (Florence, 1449 – 1494) et atelier, La Vierge adorant l’Enfant avec deux anges, vers 1490- 1495, Tempera sur bois, diamètre 31,5 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini, inv. 40016, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
Piero di Lorenzo Ubaldini, dit Piero di Cosimo, Vierge à l’Enfant et deux anges, vers 1505–1510, huile sur bois, 163 x 133 cm, Palazzo Cini a San Vio, Venise, Fondation Giorgio Cini, inv. 40017, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
Ludovico Mazzolino (Ferrare, vers 1480 – vers 1528), La Circoncision, vers 1522, huile sur bois, 31 × 23,2 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini (dépot des héritiers Guglielmi di Vulci), inv. VC 6777, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Jacopo Carucci, dit Pontormo, (Pontormo (Empoli), 1494 - Florence, 1555), Double portrait de deux amis, 1523-1524, huile sur panneau, 88 × 67,5 cm, Fondation Giorgio Cini, Galerie du palais Cini, Inv. 40025, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
L’un des grands chefs-d’oeuvre de la collection Cini est ce tableau acquis par Vittorio Cini en 1960, qui avait appartenu au XVIIe siècle aux Médicis. Pontormo, protagoniste d’une phase nouvelle de la peinture à Florence, touche ici au sommet de son art de portraitiste. L’artiste représente deux de ses amis très chers, proches de l’élite humaniste et de la famille des Médicis, autour desquels gravitait également le jeune Pontormo. Ce cercle trouvait dans les écrits de Cicéron et dans les idéaux républicains de l’Antiquité un modèle politique et culturel. Ainsi les lignes retranscrites sur la lettre que tient l’un des deux jeunes hommes est un passage du De Amicitia, important traité sur le thème de l’amitié écrit par Cicéron et qui affirme la primauté de ce sentiment sur tous les autres.
Giuseppe Porta, dit Salviati le Jeune (Castelnuovo di Garfagnana, vers 1520 – Venise, 1575-1576), La résurrection de Lazare, 1540-1545, huile sur toile, 162 x 264 cm, Venise, Fondation Giorgio Cini, inv. 20039, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
Paolo Caliari, dit Véronèse (Vérone, 1528 – Venise, 1588), atelier (Heredes Pauli ?), L’ Adoration des Mages, dernière décennie du XVIe siècle, huile sur toile, 163 × 140 cm, Fondazione Giorgio Cini, inv. 20036, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
Giovanni Francesco Barbieri, dit Le Guerchin, La Vierge et l'Enfant avec un chardonneret, 1615-1616, Fondazione Giorgio Cini, Cabinet des dessins et des gravures, Venezia © Fondazione Giorgio Cini
Giovanni Francesco Barbieri, dit Le Guerchin, Vénus et Amour endormi, 2e décennie du XVIIe siècle, Crayon rouge sur papier blanc, 20,6 × 27 cm, Fondazione Giorgio Cini, Cabinet des dessins et des gravures, inv. 36122, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Giandomenico Tiepolo (Venise, 1727 – 1804), Tête d’Oriental, 1753-1755, huile sur toile, 61 × 51 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini (dépôt des héritiers Guglielmi di Vulci), inv. VC 6318, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini
Lorenzo Tiepolo (Venise, 1736 – Madrid, 1776), Tête d’Oriental, 1753-1755, Huile sur toile, 61 × 51 cm, Fondazione Giorgio Cini, Galleria di Palazzo Cini (dépot des héritiers Guglielmi di Vulci), inv. VC 1819, Venezia © Fondazione Giorgio Cini.
Piranèse, Prison, 1761, Fondazione Giorgio Cini, Venezia © Fondazione Giorgio Cini
Francesco Guardi (Venise, 1712 – 1793), Vue de l’île de San Giorgio Maggiore, fin XVIIIe siècle-avant 1793, crayon, plume, aquarelle polychrome sur papier blanc, 90 × 70 cm, Fondazione Giorgio Cini, Cabinet des dessins et des gravures, inv. 36211, Venezia, © Fondazione Giorgio Cini.
Cette extraordinaire Vue de l’île de San Giorgio Maggiore clôt symboliquement l’exposition.
OEuvre de Francesco Guardi - éminent représentant de la peinture vénitienne du xviiie siècle, avec Canaletto -, cette aquarelle a été léguée à la Fondation Cini par Paul Wallraf et son épouse Muriel, et provient de leur collection londonienne de dessins de Venise, exposée à San Giorgio en 1959. Ce leg montre l’attachement que les historiens, les artistes, les collectionneurs et les intellectuels ont toujours témoigné envers l’institution fondée par Vittorio Cini. Rehaussée à la plume et à l’encre, avec de belles vibrations atmosphériques, cette aquarelle reprend la composition d’une veduta conservée à la Wallace Collection de Londres.
Ettore Spalletti, Sans titre, sens dessus dessous, 2000, impasto de couleur sur albâtre (bleu clair), 168 x 30 x 30 cm, Studio la Città, Vérone, photo credits Michele Alberto Sereni – courtesy Studio la Città. © Adagp, Paris, 2021
Adrian Ghenie, Autoportrait en singe, 2015 © Fondazione Giorgio Cini