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Alain.R.Truong
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25 juin 2022

Exposition "Toucher le feu. Femmes céramistes au Japon" au Musée National des Arts Asiatiques-Guimet

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Forme 20-7, Fujino Sachiko (née en 1950), Japon 2020, grès à glaçure mate blanche avec dégradés de gris, MA13124 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

PARIS - Pendant des siècles au Japon, la pratique de la céramique fut réservée aux hommes, interdite aux femmes. Il faut attendre l’après Seconde Guerre mondiale pour que de profondes mutations sociales leur ouvrent l’accès à des formations qui leur permettent de « toucher le feu ». Depuis, les artistes japonaises occupent une place prépondérante dans le domaine de la céramique contemporaine, l’une des plus créatives au monde.

La première génération des femmes japonaises qui se consacrent à la céramique combine souvent une formation artistique universitaire à un apprentissage plus traditionnel auprès d’un maître. Celle des années 1940-1960 renouvelle profondément le rapport à la matière ; la nature et ses formes sculpturales sont les traits dominants de cette génération qui fait le choix d’une matière rude, texturée, organique, délaissant le lisse et le doux.particulière. La génération la plus jeune, née dans les années 1970-1980, opère sans hésiter un retour à la porcelaine.

Femmes céramistes japonaises

Ono Hakuko (1915-1996) fut la seconde femme à recevoir le prix de la prestigieuse Société japonaise de céramique. Les œuvres d’Ogawa Machiko (née en 1946) ressemblent à des vestiges d’un champ archéologique – surtout celui de la mémoire – et illustrent sa réflexion sur le passage du temps et sur la ruine. Koike Shoko (née en 1943) emploie le grès sur un mode poétique, empruntant au vocabulaire des coquillages et madrépores, façonnant des pièces aux formes irrégulières, pincées, étirées, aux surfaces ondulées, parfois striées, couvertes de glaçures translucides passant du blanc à l’azur. Parmi les toutes premières femmes diplômées du département de céramique de l’université des arts de Tokyo, elle parvint à créer son propre atelier et à vivre de son art, grâce à une reconnaissance internationale et à sa présence dans de nombreuses collections hors du Japon. L’essentiel du travail de Katsumata Chieko (née en 1950) est végétal, avec des formes côtelées et entrouvertes, évoquant les potirons mais aussi les fonds marins dans ses dernières créations. D’abord formée à la mode, Fujino Sachiko (née en 1950), reproduit dans ses céramiques des effets de drapés d’étoffes aux replis souples, qui reflètent sa connaissance du textile. Hoshino Kayoko (née en 1949) forme des nœuds sans fin à partir d’un tronçon de pâte carrée, qu’elle referme sur lui-même et vrille. Sur la surface, les impressions faites à la paille ou avec un instrument métallique rehaussent les détails de la matière avec une régularité géométrique. Futamura Yoshimi (née en 1959) crée des volumes puissants, inspirés de racines et de rhizomes, opposant autant les textures que les couleurs.

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Ono Kakuko, Vase, 1980 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Koike Shoko, White Form, 2019 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Koike Shoko, White Form, 2019 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Katsumata Chieko, Akoda (Potiron), 2017 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Hoshiko Kayoko, Cut out / Ring 18-2, 2018 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Hoshiko Kayoko, Cut out / Ring 18-2 détail, 2018 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Fujino Sachiko, Forme 20-7, 2020 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Futamura Yoshimi, Rebirth, 2017 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

D’autres artistes se distinguent par un certain retour à la forme traditionnelle et un usage affirmé d’un corps plus lisse, souvent de la porcelaine. Kitamura Junko (née en 1956), fille d’un peintre abstrait, a gardé de son milieu familial le goût du traitement pictural de la surface. Elle travaille des formes pures et fabrique elle-même ses matrices de bambou, couvrant la surface d’estampages ornementaux. L’Île de Cythère de Tokumaru Kyoko (née en 1963), étrange nature vive qui se développe à partir d’une forme classique au risque de la détruire, est l’une des méditations sur la germination qui caractérisent le travail de l’artiste. Tanaka Yu (née en 1989) travaille l’illusion en formant dans la terre ce qui ressemble à des objets emballés dans du tissu à la manière japonaise du furoshiki, y apposant une couleur jaune profonde qui lui est très particulière.

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Kitamura Junko, Vase 20-F, 2020 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Kitamura Junko, (détail) Vase 20-F, 2020 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Tokumaru Kyoko, L'île de Cythère, 2017 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

La génération la plus jeune, née dans les années 1970-1980, opère sans hésiter un retour à la porcelaine. Chez Hosono Hitomi (née en 1979) comme chez Hattori Makiko (née en 1984), le temps est un ingrédient. Le processus d’application sur la surface est si long qu’il faut en général plusieurs mois de séchage. Les pièces restent à l’état de biscuit, c’est-à-dire sans glaçure, de manière à mettre mieux en relief la délicatesse du travail et la prouesse technique. Dans l’œuvre sculpturale de Fukumoto Fuku (née en 1973), les formes fonctionnent suivant des juxtapositions fragiles et des équilibres précaires, comme une réflexion sur l’impermanence.

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Hitomi Hosono, Zenmai (Fougères), 2016 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Michel Urtado

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Hattori Makiko, Sculpture blanche conique arrondie, 2019 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Hattori Makiko, Sculpture blanche conique arrondie (détail), 2019 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Fukumoto Fuku, Nuage, paire, 2017 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

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Fukumoto Fuku, Nuage, paire, 2017 © RMN-Grand Palais (MNAAG, Paris) / Thierry Ollivier

Depuis six ans, le MNAAG a fait de la création céramique contemporaine féminine au Japon un axe majeur de sa politique d’acquisition, inauguré par l’achat en 2016 d’une première pièce de porcelaine blanche, le vase Zenmai (« fougères ») réalisé par l’artiste Hosono Hitomi.
La céramique japonaise est l’une des plus dynamiques au monde. Le MNAAG a depuis poursuivi l’enrichissement de ses collections dans ce domaine, où la place de l’artiste femme est à la fois singulière et éminente, avec l’acquisition, suivant un axe soutenu par le ministère de la Culture sur la création féminine, de douze œuvres des 20e et 21e siècles. Elles sont présentées avec un ensemble d’autres œuvres japonaises issues des collections du musée.

Du 1er juin au 3 octobre 2022 dans le cadre de la saison japonaise au Musée national des arts asiatiques – Guimet
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