Fragonard ou la douceur de vivre
A l’occasion du bicentenaire de la mort de Jean-Honoré Fragonard, la ville de Grasse rend hommage à son peintre le plus connu. De la grande peinture historique aux petites gravures intimistes, des thèmes d’inspiration religieuse aux scènes libertines, le talent de ce peintre n'a d'égal que la diversité et la richesse de son œuvre, comme en témoigne cette rétrospective.
Les Trois Grâces (avant 1756) Huile sur toile 900 x 1340cm. Dépôt du Louvre à la Villa-musée Fragonard en 1958.
Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France
Jean-Honoré Fragonard occupe une place toute particulière dans l'histoire de l'art français. Peintre à la mode puis récrié et démodé, ce sont les frères Goncourt qui le réhabilitent au XIXème siècle et lui confèrent une renommée internationale.
Une carrière fulgurante
Né à Grasse, dans une famille de marchands, Fragonard rejoint Paris à l'âge de six ans pour y faire des études. Placé à treize ans chez un notaire, ses parents remarquent son goût pour le dessin et le présentent à François Boucher, peintre de l'Académie et futur peintre du roi. L'ayant d'abord confié à Jean Chardin, le maître le reprend dans son atelier et l'incite à concourir pour le Grand prix de peinture. Il le remporte du premier coup à l'âge de vingt ans. Fragonard passe alors six ans à l'Ecole royale des élèves protégés et entreprend un voyage de trois ans en Italie, passage obligé pour tout futur artiste. A son retour, il intègre l'Académie, ce qui le place au rang d'artiste établi. Il reçoit des commandes officielles et à son atelier au Louvre. Fragonard produit alors des toiles aux sujets historiques ou religieux.
En 1769, Fragonard peint une série de portraits classiques, plus connus sous le nom de "figures de fantaisies". Délaissant les honneurs officiels, il privilégie peu à peu une clientèle privée et les tableaux de petits formats destinés à décorer les riches intérieurs de l'aristocratie. Le trait fougueux, les couleurs vives et lumineuses de ses toiles célèbrent avec beaucoup de poésie la jeunesse et la nature. En réaction contre le puritanisme, l'esprit libertin des Lumières plâne sur la France. Contemporain du sulfureux Sade, Fragonard est le peintre de nombreuses scènes galantes, une mode initiée par Watteau. Il y présente les divertissements de la noblesse au sein d'une luxuriante nature où, sous couvert de jeu, le désir s'exprime sans entrave. Empreintes d'une grande sensualité voire même d'un certain érotisme, ces gravures remportent un franc succès et ne sont pas sans rappeler Les Liaisons Dangeureuses de Laclos. Exemples de cette période, La fuite à dessein, la série des Contes libertins de La Fontaine ou La culbute. La fuite à dessein (1783) gravé par Nacret et Couché, d'après Fragonard, burin 295 x 245, Don de M. Maurice Fenaille Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France gauche : Autoportrait âgé de Fragonard, huile sur toile, 594x460 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France A droite : Dessin de Fragonard pour les Contes de la Fontaine, gravé d'après Fragonard, lavis, 205x150 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France La culbute gravé par Charpentier d'après Fragonard , lavis, 273x300 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France ... aux prémices du Romantisme
En 1771, l'artiste peint cinq panneaux pour la comtesse Du Barry, la maîtresse officielle du roi. Placés dans son château de Louveciennes, ils lui sont rendus deux ans plus tard à cause de la parution d'un pamphlet qui critique le style Rococo trop maniéré des décors et baptise Fragonard de "grand maître du Tartouillis". Les goûts ayant manifestement évolué, le peintre change de style et, en avance sur son temps, évolue vers le Romantisme. Avec l'arrivée de la Révolution Française, s'instaure un nouveau genre : le Néo-classicisme qui prône le retour à l'ordre et la vertu. Fragonard ne trouve alors plus sa place dans le panorama esthétique et se retire à Grasse, chez son cousin dont la villa fait aujourd'hui office de musée. Il meurt le 22 août 1806. Cette exposition rassemble des prêts d'autres musées, des collections privées ainsi que des dessins très rarement présentés au public en raison de leur fragilité. Elle s'inscrit dans le cadre de manifestations organisées en France et à l'étranger (Besançon, Madrid et Barcelone) à l'occasion du bicentenaire de la mort de Jean-Honoré Fragonard. A gauche : Figure académique d'homme assis de profil à droite gravé par Bonnet d'après Fragonard manière de crayon, 350x284 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France Portrait d'homme assis (1826) lithographie Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France Les lavandières (vers 1768) huile sur toile, 732x916 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France Deux bœufs blancs dans une étable 244 x 382, pierre noire et lavis de bistre sur papier, don du baron J.Vitta Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France Le vœu à l'Amour gravé par H. Gérard d'après Fragonard, 301x359 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France La folie gravé par Janinet d'après Fragonard lavis, 213x181 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France Le serment de Junius Brutus ou la mort de Lucrèce (1787) gravé par Gauthier d'Agoty, repris, corrigé à la gouache et signé par Fragonard Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France Le contrat eau-forte, gravé par Maurice Blot d'après Fragonard 354x450 Photo © Collections de la Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard - Grasse - France
A droite : Femme debout, sanguine, gravé par Bonnet d'après Fragonard 277x185