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Alain.R.Truong
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2 avril 2015

«L’empire du sultan» à Bozar

Portrait de Bajazet Ier (1389-1402) par Paolo Véronèse (1528-1588) et son atelier © Collection Bayerische Staatsgemäldesammlungen, München

Paolo Veronese (and workshop), Sultan Bajezid I © Collection Bayerische Staatsgemäldesammlungen, München

BRUXELLES - Au début du 14e siècle naît en Anatolie un empire, qui devient rapidement la grande puissance musulmane dominante. C’est l’empire des Ottomans, ou des Turcs, comme leurs contemporains les appelaient déjà. Dans cette exposition, nous analysons les traces qu’ils ont laissées dans l’art et dans la culture de la Renaissance.

La prise de Constantinople, en 1453, et la paix de Zsitvatorok, que le sultan et l’empereur du Saint Empire romain germanique ont conclue en 1606, fixent les dates symboliques de début et de fin de la période qui nous intéresse. Il existe deux bonnes raisons de s’y limiter. D’une part, pendant la Renaissance européenne, l’intérêt renouvelé pour l’Antiquité et l’essor des sciences et des arts poussent à une plus grande ouverture vers l’Orient et donc à une intensification des échanges des biens et des idées. D’autre part, la Renaissance coïncide aussi avec l’expansion de l’Empire ottoman vers l’Europe centrale.

Les conflits entre l’Empire ottoman et les puissances européennes durant ces 150 années ont joué un rôle déterminant dans l’opposition fondamentale de ce que l’on appelle l’Orient musulman et l’Occident chrétien. Dans notre exposition, nous voulons dépasser cet antagonisme et montrer, à l’aide de nombreux exemples, à quel point le regard des Européens sur les Ottomans était déjà pluriel à l’époque, même au moment où ces derniers étaient aux portes de Vienne ou menaçaient les Vénitiens.

Dans les expositions de ces dernières décennies consacrées à l’échange culturel et artistique entre l’Orient et l’Occident, les commissaires se limitaient généralement au rôle des centres artistiques et politiques comme Venise et Florence, ou au Saint Empire romain germanique. Le Centre et l’Est de l’Europe ne bénéficiaient que d’une attention marginale, alors que, précisément, l’échange avec l’Empire ottoman y était particulièrement intense.
L’Empire ottoman et les pays du Centre et de l’Est de l’Europe étaient des voisins directs.
C’est pourquoi, dans cette exposition, nous ne pointons pas seulement les projecteurs sur l’Italie, l’Allemagne et les Pays-Bas mais, pour la première fois, nous accordons une large attention aux royaumes historiques de Pologne-Lituanie, de Bohême et de Hongrie.

Commissaires: Dr. Guido Messling, Dr. Robert Born, Michal Dziewulski (co-commissaire)

Du 27 février au 31 mai 2015. 

Gentile Bellini (attributed to), Portrait of Sultan Mehmet II (1480) Canvas © The National Gallery London

Gentile Bellini (attributed to), Portrait of Sultan Mehmet II (1480). Canvas © The National Gallery London

Mehmet II, grand promoteur des arts et des sciences, avait une prédilection particulière pour les portraits. En 1479, il pria la Signoria vénitienne de lui envoyer un peintre. Venise répondit en lui dépêchant son meilleur : Gentile Bellini. Célèbre dans sa ville natale pour ses portraits des doges, il était l’artiste idéal. 

Bellini peignit le plus célèbre portrait de Mehmet II. L’oeuvre est d’une qualité picturale exceptionnelle, ce qui ne peut malheureusement plus être apprécié à sa juste valeur à cause de problèmes de conservation. Bellini développa une nouvelle iconographie du portrait de souverain. La balustrade et les pilastres accroissent la distance entre le spectateur et le sultan, accentuant ainsi la dignité du commanditaire. Sur la balustrade pend un tissu de couleur or, décoré de perles et de pierres précieuses. Des deux côtés, on peut lire une inscription se détachant sur un fond sombre. À droite, la date à laquelle Bellini acheva son travail : 25
novembre 1480 ; à gauche, il faut lire sans doute « imperator orbis » (maître du monde). Le sultan est représenté de profil, sous un arc de pierres sculptées que l’on retrouve dans l’architecture vénitienne de l’époque. Cette composition inspira les contemporains de Bellini autant que des artistes ottomans et occidentaux plus tardifs.

Zugeschrieben an Venezianisch, Sultan Suleiman II

Venetian Artist, Sultan Suleiman II, Ca. 1530 © Kunsthistorisches Museum Vienna

Devant nous, le jeune sultan Soliman « le Magnifique ». Sous son règne de plus de quarante ans, l’Empire ottoman atteignit ses plus grandes dimensions, s’étendant sur trois continents, jusqu’aux portes de Vienne. Sur ce portrait vénitien, le jeune sultan pose de profil. Un grand külah, turban sphérique surmonté d’un cône, dissimule son front et son cou et rabat le pavillon de son oreille.

Une inscription se lit au dos de la peinture : « TITIEN ». C’est, selon les sources écrites, la principale raison d’attribuer ce portrait à Titien, l’un des peintres les plus importants de la Renaissance vénitienne. Il n’existe pourtant aucune information concernant une rencontre entre le sultan et Titien. L’oeuvre est généralement attribuée à son entourage. On pense aussi qu’il pourrait s’agir d’une copie d’après une oeuvre du maître. L’artiste s’est laissé inspirer par l’une des nombreuses représentations du sultan qui circulaient en Occident. Le portrait s’approche notamment d’une série de portraits de sultans rassemblés par Paolo Giovio, série exposée dans la salle suivante. Sur certains, on reconnaît la même pose et le même turban volumineux.

la principale raison d’attribuer ce portrait à Titien, l’un des peintres les plus importants de la Renaissance vénitienne. Il n’existe pourtant aucune information concernant une rencontre entre le sultan et Titien. L’oeuvre est généralement attribuée à son entourage. On pense aussi qu’il pourrait s’agir d’une copie d’après une oeuvre du maître. L’artiste s’est laissé inspirer par l’une des nombreuses représentations du sultan qui circulaient en Occident. Le portrait s’approche notamment d’une série de portraits de sultans rassemblés par Paolo Giovio, série exposée dans la salle suivante. Sur certains, on reconnaît la même pose et le même turban volumineux.

Attributed to Botticelli, Portrait of Montefeltro & Landino © Biblioteca Apostolica Vaticana

Attributed to Botticelli, Portrait of Montefeltro and Landino © Biblioteca Apostolica Vaticana © Biblioteca Apostolica Vaticana

Titian (Studio), La Sultana Rossa, The John and Mable Ringling Museum of Art, the State Arte Museum of Florida, Florida State University, Sarasota, Florida

Titian (Studio), La Sultana Rossa, The John and Mable Ringling Museum of Art, the State Arte Museum of Florida, Florida State University, Sarasota, Florida.

History of Sultan Sulayman, Fall of Szigetvar

History of Sultan Sulayman, Fall of Szigetvar. Bound manuscript, 1579 © Trustees of the Cester Beatty Library.

Armour of Stephan Báthory, King of Poland (1533-1586) Ca

Armour of Stephan Báthory, King of Poland (1533-1586), Ca. 1560 © Kunsthistorisches Museum Vienna.

Étienne Báthory (1533−1586) devint prince de Transylvanie en 1571 puis roi de Pologne-Lituanie en 1575. On considère que c’est lui qui introduisit la mode orientale, qui s’installe durablement au sein de la noblesse polonaise. 

Anonymous, Sultan Sulayman the Magnificent wearing the jewel-studded helmet, Ca

Anonymous, Sultan Sulayman the Magnificent wearing the jewel-studded helmet, Ca. 1532 © The Metropolitan Museum of Art/Art Resource/Scala, Florence

Automatenuhr mit reitendem Pascha Ca

Allemagne du Sud, Horloge à automate avec un pacha à cheval accompagné d’un chien, vers 1580 (Clock automaton of a pasha, Ca. 1580) © HMB-Historisches Museum Basel

L’horlogerie et l’orfèvrerie connurent un grand essor à la seconde moitié du 16e siècle dans le Sud de l’Allemagne. Les pièces sorties des ateliers d’Augsbourg étaient particulièrement recherchées dans les cours européennes et dans l’Empire ottoman. Horloges, automates et autres pièces d’ornement faisaient partie des cadeaux diplomatiques typiques des représentants habsbourgeois. Les horlogers comptaient d’ailleurs parmi les membres permanents des légations. D’après les comptes rendus, les automates, comme celui-ci, avec un pacha à cheval, étaient très en vogue, en dépit de l’interdiction islamique des représentations.

Albrecht Dürer, Oriental Rider, about 1495 © Albertina, Wien

Albrecht Dürer, Cavalier oriental (Oriental Rider), vers 1495 (?) © Albertina, Wien

En 1494-1495, Albrecht Dürer visita Venise pour la première fois et fut singulièrement frappé par les Ottomans et leur apparence exotique. Peu après, des figures habillées à l’orientale se mirent à apparaître régulièrement dans son oeuvre, bien que l’élément oriental fût le plus souvent limité au turban caractéristique. Dürer travaillait surtout d’après les figures de Gentile Bellini, et non d’après des modèles vivants.

Le Cavalier oriental a probablement été dessiné d’après un exemple de Bellini, ce que l’on déduit des proportions déséquilibrées du cavalier et du cheval, et à la manière dont tombent les plis, raides et parallèles. D’autres éléments nous enseignent encore que Dürer ne dessina pas une scène réelle. Ainsi la barbe, le turban, le vêtement et le sabre courbe sont indiscutablement ottomans, mais les éperons et la massue sont de facture européenne. Par ailleurs, il n’y avait alors aucun Ottoman à cheval à Venise !

Melchior Lorck A kettledrum player riding a camel In profile to left; the camel with ornate saddle and bridle from which bells are dangling; from a series of 127 woodcuts (ca

Melchior Lorck, A kettledrum player riding a camel In profile to left; the camel with ornate saddle and bridle from which bells are dangling; from a series of 127 woodcuts (ca. 1576). Woodcut on paper © Trustees of the British Museum

 

Sofonisba Anguissola, The chess game (1555) Oil on canvas © Fundacja im

Sofonisba Anguissola, La Partie d’échecs (The chess game), 1555. Oil on canvas © Fundacja im. Raczy?skich przy Muzeum Narodowym w Poznaniu

L’échiquier entre les jeunes soeurs de Sofonisba Anguissola est disposé sur un petit tapis d’Orient. Les peintres de la Renaissance inventaient souvent eux-mêmes des décorations de tapis inspirées de motifs orientaux. Les critiques d’art établirent ensuite des distinctions parmi les tapis orientaux peints par Lotto, Holbein, Crivelli ou Memling. Ainsi, le tapis d’Anguissola est-il un tapis Holbein
« à petits motifs ». Dans les peintures de la Renaissance, ces tapis sont assez fréquents. On les reconnaît à leurs petits motifs géométriques, qui peuvent se répéter à l’infini. Ces tapis doivent leur nom au portrait de Georg Giszes (Berlin, Gemäldegalerie) que Hans Holbein le Jeune peignit en 1532.

La représentation de tapis remplissait différentes fonctions. Ainsi le tapis aux pieds de Marie, sur le panneau de Memling, avait une fonction symbolique : il séparait la sphère sacrée de la sphère profane. Les tapis pouvaient aussi souligner le rang du défunt, comme le tapis vert sombre sur le portrait de Gáspár Illésházy (1593-1648) sur son lit de mort. Ces portraits rappelaient la fortune du défunt. Le fait que ce gentilhomme hongrois se fasse représenter avec un tapis d’Orient prouve que les objets ottomans importés et que des produits locaux d’inspiration orientale étaient considérés comme des objets de grand luxe.

onrad Gessner, Historia plantarum Drawing © Erlangen, University Library (Ms

Conrad Gessner, Historia plantarum, Drawing © Erlangen, University Library (Ms. 2386, 220v) - Conrad Gessner: Historia plantarum

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