Le progrès - la plus grande peinture murale du Vietnam, réalisée par le Français Victor Tardieu, a été restaurée et exposée dans la salle de conférence de l'ancienne Université indochinoise (19, rue Lê Thanh Tông, Hanoi). Le peintre Hoàng Hung s'est chargé des travaux de restauration.
Figée dans la mémoire collective, une peinture murale décrivant la vie des Hanoiens, illuminait la salle de conférence de l'ancienne Université indochinoise, au début du 20e siècle. Son auteur est Victor Tardieu, le premier doyen de l'École supérieure des beaux-arts d'Indochine.
Cette œuvre, conçue à l'huile et d'une superficie de 77 m², a pris 6 ans de réalisation. Au centre de la peinture, un porche, flanqué d'un frangipanier à côté et sur fond d'un grand arbre, présente une image typiquement vietnamienne. Avec près de 200 personnes d'appartenances sociales différentes, la peinture représente la société vietnamienne du début du 20e siècle et met en valeur les études et les connaissances à travers 2 sentences parallèles en caractères chinois : "Les hommes talentueux sont l'âme du pays et l'université est l'origine de la moralisation" et l'allégorie du Progrès, la mère de l'esprit prenant dans sa main un livre, orientant l'homme vers la connaissance.
Victor Tardieu a fait ses études à l'École des beaux-arts de Lyon, puis à celle de Paris. Il a réalisé de grandes oeuvres et a obtenu de nombreux prix. Ses oeuvres sont exposées aujourd'hui dans les grands musées français. Après la Première Guerre mondiale, il a obtenu le prix Indochine qui était un séjour d'un an en Indochine. Installé à Hô Chi Minh-Ville puis à Hanoi, il a accepté de décorer l'Université indochinoise qui était alors en construction. Il a mis tout son talent et ses forces à la réalisation de l'œuvre de sa vie : une peinture murale qui représente la société vietnamienne selon ce qu'il a vu et ressenti. Au lieu d'effectuer ce travail en France, il a décidé de le réaliser sur place en prenant des habitants locaux comme modèles. Il a utilisé des couleurs claires et chaudes (orange, vert foncé, brun clair, jaune) pour décrire les couleurs naturelles de ce pays tropical. Près de 200 personnes d'appartenances sociales différentes sont présentes dans le tableau, mais sans ordre déterminé. Et c'est par ce désordre que le tableau devient original et naturel comme la vie elle-même. Au cours de son travail, il a découvert l'originalité d'une culture profondément orientale mais distinctive des autres par ses particularismes. Il s'est vite intégré à la vie du pays et a trouvé chez les jeunes vietnamiens de vrais talents. Grâce à ses relations personnelles, il est arrivé à persuader le gouverneur de l'Indochine de fonder l'École des beaux-arts d'Indochine dont il est devenu le premier recteur, le 24 novembre 1924.
Victor Tardieu n'a imposé aucune école artistique à ses étudiants mais leur a transmis la passion pour l'art et les techniques fondamentales de la peinture, l'utilisation de l'huile en particulier. Grâce à son talent et son dévouement, ses élèves ont assimilé, de façon remarquable, les techniques occidentales dans le développement de l'art traditionnel et ont développé ainsi leurs caractéristiques personnelles. Chacun son style : Nguyên Phan Chanh est excellent en peintures sur soie, Tô Ngoc Vân est connu comme maître de la peinture à l'huile, Bùi Xuân Phai est devenu célèbre pour ses peintures des vieux quartiers de Hanoi...

Retrouver les valeurs perdues
Retenu pour la restauration de la peinture, Hoàng Hung, également président de l'Association de taekwondo de Hanoi, a réalisé un tableau Ô Quan Chuong (La porte Quan Chuong) qui est exposé au siège de l'UNESCO en France. Ses œuvres sont également présentes sur certains monuments connus de Hanoi.
Pour réaliser ces travaux, il ne dispose que d'une seule photo en noir et blanc de cette peinture, offerte par Mme Alix Turolla Tardieu, la petite-fille de Victor Tardieu. Recopier les détails présentés dans la peinture n'est pas difficile. La plus grande difficulté réside dans l'utilisation des couleurs car il n'a aucune idée des nuances utilisées. Il a dû se renseigner auprès des personnes qui connaissaient l'original et qui pouvaient le décrire en détail. La restauration a pris 3 mois. La peinture restaurée a été appréciée lors de l'évaluation des historiens et des anciens étudiants de l'université. Mme Alix Turolla Tardieu a remarqué que la ville de Hanoi dans cette peinture ressemblait beaucoup à l'image qu'elle s'en faisait dans son imagination à travers les souvenirs que son grand-père lui avait laissés.

Hà Minh/CVN