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Alain.R.Truong
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11 novembre 2011

L'Epine ou le Spinario par Severo Calzetta da Ravenna. Ravenne, premier quart du

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L'Epine ou le Spinario par Severo Calzetta da Ravenna (vers 1480 - vers 1520, actif à Padoue et Ravenne). Ravenne, premier quart du
XVIe siècle. Photo Marc-Arthur Kohn

Bronze. H. 20 cm, L. 15 cm, P. 15 cm - Estimation : 70 000 - 100 000 €

Cette superbe sculpture en bronze patiné est l'oeuvre de l'un des plus éminents bronziers italiens de la Renaissance, Severo da Ravenna, actif à Padoue et Ravenne durant les années 1500 - 1525. Témoin de la qualité, de la rareté et de son importance pour l'histoire de l'art, le modèle que nous présentons, L'Epine, est conservé dans les plus importantes institutions muséales du monde. Sculpté en ronde-bosse, ce bronze représente un jeune éphèbe, nu, assis sur la naissance d'un tronc d'arbre. Sa silhouette fine et longiligne est animée par le mouvement de ses bras et de ses jambes à la musculature à peine soulignée. Il appuie son talon gauche sur son genou droit afin de pouvoir ôter l'épine plantée dans son pied. Ce geste nerveux, donnant un aspect anguleux au bas de son corps, se retrouve au niveau de ses mains, une tenant son pied tandis que l'autre serre l'épine. La très belle fonte de ce bronze apparaît au niveau du visage de ce personnage, traité avec expressivité et réalisme. Il s'en dégage une impression de grand calme et de concentration nécessaire pour retirer cette petite aiguille. Le jeune homme observe avec intensité cette minuscule ronce qui lui cause le plus grand mal. Son pied droit sort légèrement d'un socle triangulaire reposant sur trois pieds griffus, caractéristique de la production de notre artiste. Cette base est ceinte d'un filet de rinceaux. Le sujet de notre oeuvre, L'Epine ou le Spinario, est tiré du célèbre thème antique du tireur d'épine dont le Musée du Capitole conserve un des plus beaux exemples de l'époque romaine (ci-dessous).

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Cette représentation a fait l'objet de plusieurs commentaires plus ou moins fantaisistes quant à sa signification. Au XVIe siècle, on a identifié ce garçon au personnage biblique d'Absalom, fils de David, renommé pour sa très grande beauté. Il a également été interprété comme le jeune berger d'une histoire légendaire, Gnaeus Martius, qui aurait sauvé Rome en portant au Sénat un message urgent. Il ne s'arrêta pour extraire l'épine qui blessait son pied seulement après avoir accompli sa mission. Au Moyen-âge, le Spinario a pu prendre une connotation religieuse et être considéré comme un symbole de pénitence au moment du Carême, arrachant « l'écharde de la chair ». Ce type d'oeuvre, où se mêlent mythologie et naturalisme a connu un immense succès en Italie en ce début de XVIe siècle, à Padoue, Ravenne, mais aussi Florence et Venise. Plusieurs versions de notre oeuvre sont présentes dans les grands musées et collections internationaux où l'on observe la même qualité de fonte et de patine ainsi que la concordance de plusieurs éléments stylistiques permettant une attribution de notre oeuvre à Severo da Ravenna. L'Ashmolean Museum, le Metropolitan Museum, le Victoria and Albert Museum, la Frick Collection (ci-dessous), entre autres, possèdent un modèle de notre oeuvre.

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Il existe plusieurs versions de notre sujet, présentant des variantes dans le tronc ou dans la position des membres qui peut être inversée. De même, certains Spinario peuvent montrer notre éphèbe en train d'arracher l'épine alors que d'autres, comme celle que nous présentons, témoigne du moment où celle-ci est ôtée. Comte tenu de la passion exercée par ce sujet, il a été beaucoup copié à l'époque par de nombreux ateliers italiens du
nord et il est parfois difficile de localiser son lieu de production. Cependant, notre oeuvre présente un certain nombre de caractéristiques qui permettent une attribution certaine à Severo da Ravenna. Le Musée du Louvre et l'Ashmolean Museum conservent respectivement un Saint Sébastien (ci-dessous)

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et un Saint Jean- Baptiste (ci-dessous) dont le visage, emprunt de sérénité et d'angélisme et coiffé d'une chevelure souple est tout à fait semblable au nôtre.

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Plus largement, l'attitude, la position ainsi que le siège du tireur d'épine, avec quelques variantes, se retrouvent dans les oeuvres de Severo da Ravenna conservées à la Fondation Bemberg (ci-dessous),

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dans la Robert H. Smith Collection (ci-dessous)

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 et au Metropolitan de New York (ci-dessous).

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 Enfin, ce socle triangulaire s'observe dans bon nombre de productions de ce bronzier qui en fit même des oeuvres indépendantes. Ce type de piédestal orné des mêmes rinceaux que sur notre bronze est visible notamment sur Atlas également conservé à la Fondation Bemberg ci-dessous).

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Tous ces indices attestent de la paternité de ce bronze à Severo Calzetta da Ravena, artiste redécouvert au cours du XXe siècle grâce notamment au grand historien de l'art Léo Planiscig.

Né vers 1480, Severo a longtemps été désigné par le sobriquet de « Maître des dragons » au regard de certaines de ses oeuvres présentant cet animal fantastique. Son nom apparaît à Ravenne en 1496 puis à Padoue dans les années 1500 selon l'éloge qu'en a fait Gauricus. En 1509, il quitte Padoue devant l'arrivée des troupes de Charles Quint et ouvre plusieurs ateliers à Ferrare mais surtout à Ravenne. Son art est à rapprocher d'autres grands bronziers de l'époque comme Riccio, Bellano ou Desiderio da Firenza. Au regard de sa production très diversifiée, allant du satyre à la figure religieuse, en passant par les objets domestiques (chandeliers, encriers) et les sujets antiques, son rôle dans l'évolution de la statuette italienne de la Renaissance est à la fois captivant et ambigu. A ce titre, et compte tenu de l'activité de ces ateliers, la critique tend à attribuer certains bronzes de Riccio à notre artiste. Pour Philippe Cros, « Severo da Ravenna est en fait l'héritier d'une tradition stylistique locale caractérisée par un réalisme, pour ne pas dire un expressionnisme, parfois non exempt de sécheresse ».

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES Philippe Cros, Bronzes de la Renaissance italienne-Fondation Bemberg, éd. Somogy, Paris, 1996

Collectif, Renaissance and later sculpture -The Thyssen-Bornemisza Collection, éd. Philip Wilson, Londres, 1992

Charles Avery, Studies in European Sculpture II, éd. Christie's, Londres, 1988

Marc-Arthur Kohn. Mercredi 16 novembre à 14h00. DROUOT-RICHELIEU SALLE 1. EMail : auction@kohn.fr - Tél. : +33 1 44 18 73 00

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