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Alain.R.Truong
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Alain.R.Truong
26 août 2007

Un orfèvre de Dai Bai prend des apprentis SDF

1Issu d'une famille pratiquant le ciselage d'objets d'art en argent depuis 4 générations, le septuagénaire Nguyên Ngoc Khuông souhaite perpétuer son métier par-delà le défi que représente la modernité. Grâce à lui, bon nombre d'enfants SDF ont l'espoir de devenir de bons artisans dans l'avenir.
Malgré la perpétuelle cacophonie régnant aux alentours, cette petite maison située dans la ruelle Ngo Giêng, près du marché d'Ô Cho Dua, à Hanoi, respire le calme. Son patron, Nguyên Ngoc Khuông, 78 ans, assis dans une chaise en bois finement sculptée, tourne et retourne sans mot dire une ancienne épée en argent. De fines sculptures représentant les 4 animaux sacrés de la cour - dragon, licorne, tortue, phénix - sont partout : sur la poignée, la lame et le fourreau également en argent. Une antiquité datant de 1895, créée par les ancêtres des Nguyên Ngoc il y a 4 générations.

Originaire du village de Dai Bai, province de Bac Ninh (Nord), ce septuagénaire perpétue son métier qui est transmis depuis plusieurs générations dans sa famille : le ciselage d'objets en argent. À 10 ans, il n'a fait que prouver sa passion et son aptitude pour l'orfèvrerie. En-dehors des heures d'études, il suivait son père dans l'atelier familial.

Des sculptures "plus raffinées que le modèle"
Dix ans après, Khuông a fait bien des jaloux parmi les artisans du village avec sa virtuosité et sa créativité. Une fois, l'adolescent s'est rendu dans un atelier voisin où l'on fabriquait des étuis à cigarette en argent. En moyenne, chaque décade, cet atelier de 4 artisans sortait 25 unités. Intelligent de nature, Khuông a semblé en saisir tous les secrets au bout de 3 heures d'observation silencieuse. Il proposa ensuite à sa mère d'aller acheter une grande quantité de matières premières pour finalement se mettre au travail. Avec un résultat surprenant : 50 étuis fabriqués en 5 jours pour la première tranche, puis 150 dans le même temps pour la seconde tranche. Chose plus formidable : outre une "vitesse vertigineuse" d'exécution, les sculptures sur ses produits étaient "plus raffinées que celles du modèle", avoua un artisan de l'atelier voisin.

Sa réputation se propage loin. Des jeunes de la région sont venus le solliciter pour apprendre le métier. Nombre de ses "élèves" sont devenus par la suite des "artisans aux mains d'or" de niveau national, tels Nguyên Van Huong ou Nguyên Ngoc Trong.

Dans les années 50 du siècle passé, Nguyên Ngoc Khuông a assumé le poste de président de la coopérative de ciselage d'objets d'art en argent exportables de Dai Bai. Une centaine d'artisans locaux y avaient un emploi stable. Les produits de marque Dai Bai étaient alors présents un peu partout en Europe orientale. Les villageois rappellent souvent et avec fierté cette histoire pas comme les autres. Une fois, un Hongrois est venu chercher M. Khuông pour lui présenter un ensemble de 3 objets antiques en argent : une chandelle, un verre à pied haut et un récipient à sucre. "Pourriez-vous en faire de pareils?" lui demanda-t-il, l'air sceptique. En revenant la semaine suivante, il ne put s'empêcher de pousser un cri d'étonnement en voyant 6 objets posés sur une table, incapable de distinguer les originaux des copies. D'emblée, un contrat commercial a été conclu entre le client hongrois et le président de Dai Bai, permettant la production en série de ces objets d'art.

Talent et vertu font un bon artisan
Attaché corps et âme à son métier traditionnel, l'artisan chevronné n'a jamais eu l'idée de l'abandonner, même dans les périodes les plus difficiles de la décennie 70, où les produits de Dai Bai ne trouvaient pas de débouchés stables. D'habitude, à chaque fois qu'il rencontre un problème, M. Khuông sort son épée en argent, considérée comme un legs sacré de sa famille. "L'objet me redonne de l'énergie et de la force," confie t-il.

La prenant dans ses 2 mains, M. Khuông dit à ses enfants : "Nos ancêtres doivent être fiers en voyant que nous - mes enfants, mes petits enfants et moi - savons perpétuer et développer le métier de notre famille."

Ces dernières années, le vieil artisan vit avec ses enfants à Hanoi. L'âge très avancé lui pesant de plus en plus, il se rend compte, aujourd'hui plus que jamais, de la nécessité de transmettre son métier aux jeunes générations. Plus d'une fois, il va dans la rue à la rechercher des enfants sans domicile fixe (SDF) et les inciter à apprendre un métier pour pouvoir gagner leur vie. Désormais, il a de nombreux apprentis auxquels il donne le gîte, le couvert et le savoir-faire du ciselage d'argent, sans oublier des leçons de savoir-vivre. Pour lui, talent et vertu font le caractère d'un artisan authentique. "L'orfèvre peut embellir la vie par ses précieux produits, mais aussi faire le contraire au cas où il laisse naître en lui une mauvaise ambition. Ainsi, vous devez vous instruire du mieux possible, à la fois de la vertu et de la profession, avant de devenir un bon artisan," dit-t-il à ses disciples. (Nghia Dàn/CVN )

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